lundi 9 octobre 2017

Bora Bora sans une trace de gras

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Emilie Boré et Daniel Abimi – Deux auteurs pour rédiger un microroman d'une cinquantaine de pages: autant dire que l'espace est compté, et que chaque mot doit être pesé! Pas une trace de gras, rien de superflu. Il n'en faut pas moins pour aborder le monde des fitness avec un regard littéraire. Tel est le fond du livre "Bora Bora Dream", dernière parution des éditions BSN Press dans la collection "Uppercut". Et sur ce coup-ci, percutant, l'ouvrage, signé Emilie Boré et Daniel Abimi et présenté comme un cadavre exquis, l'est éminemment.


On imagine volontiers les deux auteurs incarnant les deux personnages du livre: un homme et une femme, comme les deux personnages. Ces derniers hantent un fitness, avides de sculpter leur corps, et en particulier leur ventre, leurs abdos en somme.

C'est qu'autant qu'un roman sur le fitness, "Bora Bora Dream" est un roman sur les ventres... Celui, presque plat, que la femme caresse. Et celui de l'homme qui fait ses abdos: splendide évocation, au chapitre 6, que celle de l'homme qui, lentement, effectue ses exercices de musculation. C'est lent, ça se détaille en phrases courtes écrites à l'infinitif: le lecteur est vraiment en place sur l'agrès, suant, inspirant et expirant.

Et dans ce royaume de la sueur qu'est un fitness, ce monde où chacun observe chacun mine de rien, où les tensions comme la séduction ont leur place, s'installe une attraction entre les deux personnages créés par les auteurs. Dès lors, peu à peu, le ventre devient autre chose qu'une partie du corps qu'on sculpte dans une obsession du paraître. Autant dire qu'une fois de plus, la collection "Uppercut" propose avec "Bora Bora Dream" un roman qui part du sport pour dire tout autre chose.

Cet autre chose, ce sont aussi les rêves évanouis, la vie qui reprend ses droits dans toute sa cruauté, semblant empêcher toute évasion. Récurrente, l'image de la carte postale de Bora Bora et de ses houles, précieusement conservée par l'homme, symbolise ainsi le caractère possiblement inaccessible de tout rêve.

Roman à quatre mains? Emilie Boré et Daniel Abimi ne sont pas les premiers, ni les derniers sans doute, à se livrer à l'exercice: on se souvient de l'efficace "Duellistes", opus récent de Chrystel Duchamp et Sébastien Bouchery. Et les deux écrivains ne sont pas non plus les premiers à s'être intéressés au monde des fitness, puisque Gilles de Montmollin, écrivain vaudois, lui a consacré plus d'une belle nouvelle. Reste que tant dans le mode d'écriture choisi que dans l'univers abordé, Emilie Boré et Daniel Abimi réussissent à proposer un opus personnel, efficace et percutant, qu'on ne saurait confondre avec aucun autre ouvrage.

Emilie Boré et Daniel Abimi, Bora Bora Dream, Lausanne, BSN Press, 2017.

Egalement lu par Francis Richard,
Le blog d'Emilie Boré, le site de l'éditeur
Défi Rentrée littéraire.

2 commentaires:

  1. tu en parles très bien et ce thème plutôt original m'intrigue!

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    Réponses
    1. Merci Violette!
      C'est un bon microroman, qui se distingue par son efficacité: rien n'est de trop, vraiment, tout est pesé.
      Je t'en souhaite une agréable découverte!

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