mercredi 11 septembre 2024

L'amour vache, et pire si entente

Antonio Albanese – Bel exemple de récit tragique, le dernier roman d'Antonio Albanese, "Le complexe d'Eurydice", laisse une impression des plus perturbantes, bien plus profonde que celle que laissent les romans policiers de l'auteur – on pense entre autres à la série vagabonde des "Matteo di Genaro". La clé réside dans la première phrase de ce roman psychologique aux teintes ténébreuses: "Nous existons exclusivement dans le regard des autres".

Un incipit banal? Voire: c'est précisément ce que l'écrivain développe au fil des quelque 150 pages de ce livre, au travers de la description d'une vie de couple condamnée à la descente aux enfers. L'histoire est relatée du point de vue de l'homme, et le mythe d'Orphée n'y apparaît guère: nous avons affaire à un brave garçon actuel dans la trentaine, Occidental ordinaire voire insignifiant, un poil immature ("si fragile et toujours à sa propre écoute", aurait dit le sulfureux Alain Soral), enseignant au primaire par passion, mis à l'abri du besoin par un héritage confortable. Sur un site de rencontre, il rencontre son destin...

... en la personne de Lucrecia, superbe quadragénaire passionnée et fantasque d'origine argentine, à la recherche d'un homme protecteur voire macho, incapable de vivre dans une relation qui ne soit pas violemment conflictuelle parce que son vécu l'a conditionnée ainsi. Chômeuse, cachottière, elle est aussi une championne de la débrouille, aux limites de la légalité. Un mensonge de la part du narrateur l'accroche: celui-ci lui dit qu'il a fait de la prison. Ce sera le péché originel de l'histoire.

En fin psychologue, l'auteur construit dès lors avec un réalisme troublant, jusqu'à l'issue terrible, le fonctionnement de ce couple dysfonctionnel, en marchant sur la corde raide: du mec qui cogne ou de la femme qui manipule, qui est le plus coupable? L'un était-il fait pour l'autre, vraiment? Le lecteur peut croire à une forme d'amour vache dont le moteur est le conflit, la part sombre d'un personnage nourrissant celle de l'autre. Mais ce serait trop facile.

Un homme qui cogne sa compagne, c'est impardonnable mais ça peut s'expliquer. Le récit peut dès lors être vu comme la manière dont un homme peut, face à une femme que par tempérament, il n'est pas en mesure d'affronter d'égal à égale, finir par avoir recours à une violence fatale, parce qu'il s'est laissé transformer peu à peu (et à contribué à cette évolution) en individu violent, sans avoir les outils nécessaires pour mettre à lui-même et à l'autre les garde-fous indispensables. Cela, juste pour complaire au regard et aux attentes présumés de l'autre.

La narration à la première personne renforce aux yeux du lecteur l'impression que foncièrement, le narrateur se regarde vivre, face à une Lucrecia qui lui tend un miroir volontiers dépréciatif et ne manque pas de relever ce travers, jouant sur la corde sensible de la culpabilité occidentale. Car oui: le motif plutôt protestant du rapport à la faute est récurrent dans "Le complexe d'Eurydice": face au miroir tendu, le lecteur voit le narrateur évoluer, se muscler par la natation, et se conformer à l'idéal masculin présumé de Lucrecia. Idéal inaccessible: en définitive, le narrateur, en renonçant à rester fidèle à lui-même et à dire "non" à temps à une personne qui le détruit, oublie que les autres personnalités sont déjà prises. 

Antonio Albanese, Le complexe d'Eurydice, Lausanne, BSN Press/Okama, 2024.

Le site d'Antonio Albanese, celui des éditions BSN Press, celui des éditions Okama.

dimanche 8 septembre 2024

Dimanche poétique 656: Sandrine Erdely-Sayo

Temps goes tango

Rythme à deux temps pour deux pas lents,
Deux rapides pour un élan,
Un arrêt de chorégraphie,
Souris!

Je faisais un pas en arrière,
Tu faisais deux pas en avant,
Au son d'un Tango argentin,
Reviens!

Nos jambes s'étaient emmêlées,
Nos doigts étaient entrelacés,
Ton corps penché, le mien courbé,
Olé!

J'avançais, toi tu reculais,
Tu faisais un pas de côté,
Ton bras m'a ramené vers toi,
Emoi!

Ton regard a croisé le mien,
Mes yeux ont accroché les tiens,
Suggestions en fin de cadence,
Danse!

Une Milonga aux sons clairs,
Une Habanera dans les airs,
Pour une passion primitive,
Vertige!

Mes mains accrochées à ton cou,
Je tourne fléchis un genou,
En écoutant l'accordéon,
Allons!

Provocation des mouvements,
Désirs de gestes séduisants,
Tempo tentant pour un Tango,
Complot!

Un fox-trot nous a dérangés,
Changeant nos pas, nos bras, nos doigts,
Et tu m'as marché sur le pied,
Gagné!

Sandrine

Sandrine Erdely-Sayo (1968- ). Source: Poésie.co.

vendredi 6 septembre 2024

"Dormez en Peilz", un polar en immersion dans le Léman

Emmanuelle Robert – Ah, les eaux sombres du Léman! Suivant le conte "La Vierge des Glaces" de Hans Christian Andersen, la romancière suisse Emmanuelle Robert plonge avec ses lecteurs en eaux troubles, loin des visions de carte postale du lac qui borde Lausanne et le château de Chillon. Cela donne l'ample roman policier "Dormez en Peilz". Pour faire bonne figure et marquer le lecteur, l'auteure choisit de caler son intrigue en 2021, alors que le monde se dépêtre doucement du covid-19. De quoi éveiller des souvenirs!

Précisément, c'est l'univers des plongeurs en apnée que l'écrivaine explore. Les morts s'entassent soudain à la belle saison, et une tentative de record se révèle dangereuse. Est-ce accidentel, tout ça? La police s'interroge, les morts ne sont pas identifiés tout de suite, ça piétine un peu, et ce n'est qu'à la fin du roman, comme de bien entendu, que le lecteur aura toutes les pièces d'un puzzle parfaitement cohérent. Ce qui n'a rien d'évident, tant les personnages sont nombreux et tant leurs destins, leurs aspirations et leurs frustrations s'imbriquent.

L'auteure apporte en effet une importance certaine à ses personnages et à leurs interactions. Ce qui saute avant tout aux yeux du lecteur, c'est le jeu des attirances amoureuses, sexuelles ou sentimentales, passées ou présentes, porteur d'une tension constante à base de pulsions parfois violentes, voire irrésistibles. Il y aura donc des viols, mais aussi des amours passionnées, voire des révélations, pour certains, sur leur orientation sexuelle. Cette dimension outrepasse même la frontière entre la police et les civils mis en cause. Elle va jusqu'à coller à l'actualité: qu'on pense à la scène torride vécue par deux protagonistes sur fond bruyant de match Suisse-France. Ça se passe à la rue du Simplon à Lausanne (pas loin du restaurant du Milan, dont la romancière donne soit dit en passant une image sympathique et, expérience faite, réaliste), et la nuit sera mémorable, à plus d'un titre...

Elle-même plongeuse en eaux douces, l'auteure donne dans "Dormez en Peilz" une description crédible et détaillée de l'art de l'apnée, rendu populaire par le film "Le Grand Bleu" de Luc Besson. Technique juste ce qu'il faut, soucieuse du mot juste, osant le jargon, la romancière a le chic pour immerger son lecteur dans chacune de ses plongées. Elle décrit les ressentis, y compris ceux qu'on vit sous forme d'ivresse des profondeurs lorsqu'on va jusqu'à ses limites et qu'on les teste – ainsi, la tentative de record de Fabienne apparaît avec un réalisme impeccable.

Quelques mots sur l'écriture, enfin: l'auteure assume une prose efficace et familière qui met tout de suite à l'aise. Parfaitement consciente du terroir dont elle parle, elle ne recule pas devant des mots et des tours de langage typiquement romands, sans pour autant verser dans l'artifice folklorique. Cette manière romande de parler se retrouve en particulier dans le dialogues, certains personnages (et pas forcément ceux auxquels on s'attend) ayant la parlure welche, vaudoise ou non, chevillée au corps. Ce qui donne de la couleur à leur verbe.

Plongée immersive et haletante (!) dans le Léman, "Dormez en Peilz" est aussi un voyage dans les zones d'ombre et de lumière de chaque âme humaine, voire animale si l'on pense aux chats et aux chiens qui, compagnons des humains, hantent ce roman policier. L'écriture ne se précipite jamais: pareille à l'eau patiente, à la fois accueillante et insidieuse, elle prend son temps pour décrire tout un microcosme où chacun (et chacune!) cherche à tirer son épingle du jeu.

Emmanuelle Robert, Dormez en Peilz, Genève, Slatkine, 2023.

Le site d'Emmanuelle Robert, celui des éditions Slatkine.

Lu par BadGeeketteCathJack, Cédric SegapelliLivr'Escapades, Pascal K.Rebecca.

dimanche 1 septembre 2024

Dimanche poétique 655: Pierre-André Milhit

j'ai dessiné sur la carte des ponts
sur le chapeau d'une naine
j'ai nommé les torrents
sur les plis de sa robe
et tracé le chemin
entre ses seins de matrone

à quelle heure part le train du désir
quelle gare pour la caresse
quel guichet pour le baiser
quel terminus pour le plaisir

la garde-barrière dit que l'amour arrive à l'heure

Pierre-André Milhit (1954- ), La garde-barrière dit que l'amour arrive à l'heure, Gollion, Editions d'autre part, 2013.

samedi 31 août 2024

Itinéraire d'un garçon en rupture

Laure Mi Hyun Closet – Paru en 2014, "On ne dit pas "je"!" est l'un des tout premier ouvrages de Laure Mi Hyun Croset. Il y est question d'un certain Lionel Stéphane Dulex, garçon que la romancière a rencontré dans le monde de la nuit. Raconter son histoire? C'est ce que Lionel a proposé à Laure. Défi relevé! Il en est résulté un ouvrage court et dense, "bilan sacré" exemplaire de ce que peut être une jeunesse marquée par l'univers de la drogue tel qu'il se concevait en Suisse à la fin du vingtième siècle.

Tout commence derrière les barreaux d'un lit d'enfant, qu'on peut voir comme la préfiguration de ceux d'une prison: voici le petit Lionel, ballotté dans un environnement familial instable et dysfonctionnel que la romancière recrée avec un soupçon d'humour distancié, grinçant par moments. Tout est en place pour que Lionel dérape, c'est ce que se dit le lecteur adulte, ayant eu le bonheur de traverser sa jeunesse sans plonger vers le fond.

C'est que Lionel va foncer dans le monde de la drogue, en un crescendo que ce récit biographique épouse. L'écrivaine ne juge pas, ne cède jamais à la tentation de dramatiser: elle se contente de raconter avec objectivité le destin de son personnage, et c'est sans doute le plus difficile dans un tel projet littéraire. Exercice réussi! Le lecteur trouvera, sans fard, les histoires et anecdotes d'un drogué qui cherche désespérément de quoi se payer sa dose, qui joue à cache-cache avec la police, mais qui vit aussi une existence aventureuse qui le formera, entre expéditions en Thaïlande avec son père et errances en Europe, pouce tendu sur le bord des routes.

Avide de justesse, nourrie d'un certain humour, l'écriture s'avère impeccablement précise pour décrire le destin d'un jeune homme, entre moments forts et positifs qu'il convient de relever et plongées vertigineuses dans l'enfer des toxicomanies les plus diverses. 

Il est permis de penser, au fil des pages de "On ne dit pas "je"!", au témoignage "Moi, Christiane F., droguée, prostituée...", et pas seulement parce que le destin de Lionel passe par Berlin: en évoquant ce récit, la romancière fait de son livre le récit frère de celui de Christiane F. Cela, sans oublier que de même que l'histoire de Christiane Felscherinow a été rédigée par des tiers, journalistes de leur état, le destin de Lionel a été mis en récit par une romancière.

La franchise du propos permet à l'auteure de mettre à nu ce qui peut fabriquer un toxicomane: l'absence de considération, positive ou non, de la part des parents ou de l'entourage, le contexte social dont on s'éloigne et qu'on craint de retrouver de peur de replonger, l'envie de frimer à l'école ou ailleurs, d'être populaire en somme. Cela s'accompagne de mensonges aux uns et aux autres, de dissimulations, et force est de relever que Lionel se montre assez adroit pour se créer un personnage et masquer son côté sombre et intoxiqué.

Une génération après "Moi, Christiane F., drogue, prostituée...", "On ne dit pas "je"!" se révèle comme le témoignage important. Il relate la vie d'un garçon qui plonge jusqu'au fond, mais conserve jusqu'au bout une étincelle, une envie de vivre et, en définitive, de trouver sa place dans le monde des humains, sans la béquille des stupéfiants et de leurs promesses fallacieuses. Clean, Lionel fait à présent partie du monde de la nuit romand. Peut-être fallait-il tout ce parcours tortueux pour en faire un homme; s'il a tourné le dos à toute drogue illégale, il assume pleinement l'expérience que lui aura valu son parcours, si tortueux et torturé qu'il ait été.

Laure Mi Hyun Croset, On le dit pas "je"!, Lausanne, BSN Press, 2014.

Le site de Laure Mi Hyun Croset, celui des éditions BSN Press.

vendredi 30 août 2024

Trouble dans le trouple? Voyeurs avec Anne-Frédérique Rochat

Anne-Frédérique Rochat – "Le trouble", c'est un tout petit monde que le lecteur est invité à observer de tous ses yeux, au moins. Soudain, le mensonge injecte son venin dans un couple, et l'écrivaine Anne-Frédérique Rochat en décrit les effets sur Armelle, épouse d'un Léonard dont les absences au foyer domestique s'expliquent par une présence chez une autre femme. 

"Le trouble" met en scène une Armelle soudain passionnée par la surveillance de son mari: elle prend une chambre d'hôtel dans l'impasse où Léonard disparaît, avec vue sur l'appartement d'en face, celui où il mène sa double vie, une vie de famille qui s'oppose à la vie de couple qu'il vit avec Armelle. Voyeure, Armelle embarque dans son trip un lecteur qui se demande où tout cela va se terminer. 

Personnage de voyeur, Armelle n'est qu'yeux à plus d'un titre: son métier d'oculariste consiste à fabriquer des yeux de verre. Avec eux, elle se constitue un monde à part, fait de globes de toutes les couleurs, qu'elle considère comme attachants, voire émouvants. L'auteure décrit ce métier en profondeur, jouant aussi sur l'émotion résultant d'une telle création artisanale: les yeux créés par Armelle semblent ainsi avoir une âme, une personnalité, à telle enseigne qu'il peut être difficile de s'en détacher.

C'est entendu: c'est par Léonard que le mensonge arrive dans le couple, contraignant Armelle à réagir à son tour de manière trompeuse. Les prétextes sont classiques: surcroît de travail, sortie au cinéma. L'auteure fait de chaque moment de partage entre eux une partie de poker menteur virtuose, fondée sur des dialogues de sourds, des questions sans réponse et des non-dits. Il est permis de considérer que la rue de la Clef, une impasse, constitue la métaphore des impasses liées au mensonge. Et que c'est là que se trouvera le dénouement, la clé de l'intrigue.

L'écrivaine radiographie ainsi un couple qui part à la dérive. Mais la nuance est aussi là: c'est avec exactitude que la romancière décrit les états d'âme d'une épouse délaissée mais toujours aimante, évoluant entre déni et défense, allant même jusqu'à chercher des excuses à son mari volage. Quant à Léonard l'opticien (la vue, encore!), la romancière le laisse vivre, sûr de ses mensonges comme de sa cuisine, imperméable à toute explication.

On se demande dès lors où l'on va arriver, et la finale, changement de focalisation inclus, correspond à l'un des possibles. Cela, avec une question qui reste en suspens si j'ai bien compris: l'amante sait-elle qu'elle a tué, en définitive, l'épouse de son amant? Ou, dans son esprit, s'est-elle juste débarrassée d'une folle qui l'espionnait? 

Il y a un côté comédie de mœurs dans "Le trouble", porté par ses douzaines d'yeux de verre qui viennent s'ajouter à ceux, curieux, du lecteur: une partie de l'intrigue est vue d'un hôtel sans nom, baptisé par commodité l'hôtel "Hôtel". Au fil des pages la romancière décrit finement, jusque dans leurs demi-teintes et faux-semblants, les aléas d'un couple devenu malgré lui un ménage à trois, contaminé par le mensonge.

Anne-Frédérique Rochat, Le trouble, Genève, Slatkine, 2024.

Le site d'Anne-Frédérique Rochat, celui des éditions Slatkine.

jeudi 29 août 2024

Lumière sur quelques mystères au sujet d'Alexandre le Grand

Alexandre Schoedler – Alexandre le Grand n'a pas encore livré tous ses secrets aux historiens d'aujourd'hui, loin s'en faut: des incertitudes persistent quant aux conditions de son décès, et son tombeau est considéré comme perdu. C'est ce monde d'incertitudes que l'écrivain Alexandre Schoedler explore dans "Alexandre le Grand, l'assassinat et la tombe perdue", un roman historique aux contours étonnants.

Celui qui s'attend en effet à une biographie romancée et immersive du roi de Macédoine sera sans doute déçu. L'auteur, en effet, s'attache davantage à mettre en scène quelques chercheurs spécialisés, à commencer par l'écrivain marseillais Octave Borelli (1849-1911) et à retracer, sur une période qui couvre le vingtième siècle, ce que l'on sait aujourd'hui d'Alexandre le Grand, et ce que l'on suppose. L'ambiance est donc mondaine et érudite à la fois, et le lecteur se sent bien mis en situation lorsqu'il voit apparaître des célébrités familières telles que Sarah Bernhardt ou Pierre Loti.

Reconstruite par des personnages de naguère ou d'aujourd'hui, privilégiant les longs dialogues, la narration semble dès lors distancée. Telle est la distance des siècles, entre un personnage historique que tout un chacun croit simplement connaître et ceux qui, l'évoquant, témoignent d'un intérêt marqué pour Alexandre le Grand. Ces personnages incluent, actuellement, quelques passionnés qui s'intéressent par ailleurs au destin de Louis XVII, qui, estiment-ils, n'est peut-être pas mort comme le racontent les historiens. C'est dans ce cadre que l'auteur de "Alexandre le Grand, l'assassinat et la tombe perdue" se met lui-même en scène.

Dès lors, l'évocation des derniers jours d'Alexandre le Grand, des tribulations de son tombeau et des années de guerre civile qui ont suivi sa mort prennent l'allure d'un vaste flash-back, que l'auteur alimente de nombreux détails: il n'est pas toujours évident de s'y retrouver dans le labyrinthe des alliances et trahisons qui se font jour entre les "diadoques", généraux qui se sont partagé l'empire d'Alexandre le Grand dans un souci égoïste constant de tirer la couverture à soi. Dès lors, l'hypothèse, jugée minoritaire, d'un assassinat par empoisonnement, commis par des jaloux, reprend des couleurs selon l'auteur. Les pages qui tentent d'identifier le poison qui aurait pu tuer Alexandre le Grand ont dès lors le goût d'un chapitre de polar – celui qui relate la visite rituelle chez le médecin légiste.

Il est certes permis de regretter, d'un point de vue éditorial, les coquilles et les maladresses d'écriture que contient "Alexandre le Grand, l'assassinat et la tombe perdue", qui apparaît dès lors comme un texte publié brut de décoffrage. Sur le fond, le lecteur intéressé aurait aussi apprécié quelques références bibliographiques, voire, pourquoi pas, des images: l'auteur laisse entendre qu'il dispose d'archives privées. 

A la fois récit historique et témoignage personnel, ce livre a cependant le mérite de projeter, en suivant en particulier l'érudit Octave Borelli, un éclairage original sur un personnage historique dont tout le monde connaît le nom, qui fait partie des meubles comme on dit, mais dont le destin, dans ses détails, est largement oublié. Une suite? L'auteur la promet dans une note en fin d'ouvrage. Gageons qu'elle sera encore plus instructive que "Alexandre le Grand, l'assassinat et la tombe perdue".

Alexandre Schoedler, Alexandre le Grand, l'assassinat et la tombe perdue, Paris, Hello Editions, 2022.

Le site de Hello Editions.

Lu en partenariat avec simplement.pro.