lundi 25 juin 2018

Gabriel Bender: et si les Jeux olympiques ne revenaient pas...

fioul
Gabriel Bender – Le 10 juin dernier, le peuple valais refusait à une claire majorité (54%) qu'on organise des Jeux olympiques autour de la ville de Sion en 2026. Vu de loin, le projet avait certes quelque chose d'amateur, de pas tout à fait fini. En de rapides chroniques collectées dans "Fioul sentimental", l'écrivain et sociologue valaisan parvient à mettre des mots sur le malaise que peut susciter un tel projet, pourtant exaltant a priori. Et à chaque fois, il met le doigt là où ça fait mal, avec l'accent s'il vous plaît.
 
Pour commencer, rappelons ce que l'observateur le plus distrait a pu voir et entendre hors du Valais: une équipe de notables où figurent Christian Constantin, Christophe Darbellay, respectivement doués en gestion du football et en politique lancent un projet de candidature de Sion aux Jeux olympiques d'hiver 2026. En matière de communication, le premier couac a consisté à allumer une flamme au sommet du Cervin, à grands renforts de barils d'essence et d'hélicoptère bien polluants. On comprend mieux le titre du livre de Gabriel Bender, "Fioul sentimental". Et aussi ce qui est écrit sur la première page du livre: "Ravivez la flamme! Ça fait un peu réchauffé."
On l'a compris, l'auteur de "Fioul sentimental" n'est pas très chaud à l'idée d'organiser des Jeux olympiques d'hiver en Valais. En bon Suisse, il sait compter, surtout lorsqu'il est question de gros sous: il relève, narquois, que cela profitera surtout à un truc privé nommé Comité international olympique et à quelques cantons voisins, où les officiels seront du reste logés parce que c'est plus sympa. On relève avec amusement que dans ses décomptes, empreints du chouïa de mauvaise foi indissociable du genre, les nombres 2026 et 5 apparaissent fréquemment. 2026 comme l'année des Jeux, 5 comme les anneaux olympiques. 
 
Au-delà des Jeux olympiques que le Valais n'aura pas (du moins pas en 2026), "Fioul sentimental" aborde sur un ton grinçant, sobre ou gouailleur, le fonctionnement sui generis d'un canton qu'on n'a jamais réussi à vraiment mettre au pas. Peu skieur et à peine honteux, l'auteur brocarde une compétition où l'on ne fait que glisser. Il déplore aussi l'esprit de compétition des jeux, finalement bien peu en phase avec un esprit égalitaire bien républicain. Et alors que les Jeux olympiques sont censés être un moteur de croissance et de développement, l'auteur rappelle quelques éléments qui auraient bien besoin d'un coup de pouce même pas olympique, à l'instar de la finition de l'autoroute qui traverse le Valais. Mais ça coûte une blinde... et comme on le sait, l'écrivain sait compter: même si tout va bien, l'autoroute sera finie après les Jeux. Ce qui amuse le lecteur, tiens!
En effet, le chroniqueur n'a pas son pareil pour amuser ses lecteurs! Il manie un humour à froid (normal, on parle de Jeux olympiques d'hiver, hé hé!) qui met en évidence ce en quoi le projet olympique n'est pas fait pour le Valais: c'est un désastre écologique (comme la piste de l'Ours, percée pour rien à travers les bois), un foirage financier (l'écrivain sait compter, patati patata, etc.). Il va jusqu'à suggérer qu'il n'est pas certain qu'on pourra y vendre du fendant aux restaurants pour arroser ce qui se mange, vu les exigences des sponsors – McDonalds, par exemple, assez étranger à la culture du bon vin mais gourmand d'exclusivités.
 
Ce n'est pas la première fois que le Valais et Sion ambitionnent d'organiser les Jeux olympiques d'hiver, et ce n'est pas la première fois qu'il faut y renoncer. La précédente, les Jeux sont partis à Turin, qui avait un dossier plus séduisant à défaut d'être plus solide, à ce qu'on dit. Les chroniques de Gabriel Bender sur ces Jeux olympiques valaisans morts-nés entre 2018 et 2026 le rappellent, et semblent dire: "Qu'on en finisse!", tant l'olympisme apparaît comme quelque chose en porte à faux avec les valeurs d'écologie, entre autres, qu'on aimerait voir monter plus haut. On rit jaune au fil des pages de "Fioul sentimental", recueil irrévérencieux et définitivement libertaire, désireux qui plus est de cerner un malaise valaisan. Et pour ce faire, les textes de Gabriel Bender sont illustrés par les dessins rapides et efficaces de François Maret: on ne peut qu'aimer ses petits bonshommes, à la fois hardis et dérisoires... 
 
Gabriel Bender, Fioul sentimental, Saint-Pierre-de-Clages, VS Vae Soli, 2018.

2 commentaires:

  1. Bonjour et merci pour le commentaire.
    Il y a deux erreurs de faits.
    1. Il s'agit de Dominique Giroud et non pas Gabriel.
    2. Giroud n'est pas instigateur des Jeux, le monsieur a suffisamment de casseroles et comme il est susceptible mieux vaut corriger.
    merci

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    Réponses
    1. Bonjour, merci de votre retour et ces précisions! J'ai supprimé l'allusion à M. Giroud.
      Encore merci pour les moments de lecture!

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