jeudi 22 mai 2025

Quand la mort rôde sur le campus stéphanois

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Didier Esposito – Après tout, n'importe quel personnage d'un roman policier peut mener l'enquête. Alors, pourquoi pas de jeunes étudiants? "Candeur fatale", second roman de Didier Esposito publié aux éditions du Caïman, exploite ce ressort. Cela lui donne l'occasion de dépeindre une jeunesse d'aujourd'hui, motivée par ses études mais aussi exaltée par moments, pour le meilleur et pour le pire. Tout cela, dans le cadre de la ville de Saint-Etienne.

Tout commence lorsqu'Alexis, rentrant dans son logis d'étudiant, découvre sa voisine de chambre étalée au sol sur le bitume, morte, comme tombée de sa fenêtre. Il ne la connaît guère, juste quelques mots, mais ça suffit pour créer un lien dans de telles circonstances. Parallèlement à la police, il va mener sa propre enquête: quelle est son histoire? Suicide ou homicide? Le lecteur comprend assez vite que la deuxième réponse est la bonne: sans cela, il n'y aurait guère de roman.

Celui-ci recrée de façon crédible le motif assez classique de la traite des femmes d'Europe orientale – on pense au roman "Les jeunes filles et la mort" de Michael Genelin ou au film "Lilya 4-ever" de Lukas Moodysson, entre autres. Parallèlement à la vie estudiantine d'Alexis et de ses amis et amies, en effet, l'auteur dessine le destin malheureux de deux jeunes femmes biélorusses piégées par un recruteur charmeur qui leur promet un avenir moins gris que ce qu'elles peuvent espérer à Minsk. 

La captivité de ces deux jeunes filles sera double, relevant à la fois de la force de l'humain et de celle de la dépendance à l'héroïne. Lena, Marina, comment s'appellent-elles? Au gré d'identités flottantes, les deux jeunes femmes vont perdre une part substantielle de leur humanité sur les tapins de Milan, puis de Saint-Etienne. Et cette déshumanisation passe aussi par un changement de prénom.

Parce que oui: c'est à Saint-Etienne que tout se joue. L'auteur en restitue le contexte dans un souci de réalisme, allant jusqu'à donner l'adresse de certains de ses personnages (je n'ai pas retrouvé le 10, rue José Frappa lors de mon dernier passage à Sainté, mais je réessaierai!) ou à suggérer certains bars appréciés de la jeunesse stéphanoise. L'auteur ne manque pas de décrire aussi des quartiers moins cools a priori, par exemple du côté de la rue Virgile. Un petit regret, du coup: le lecteur aurait aimé avoir une plongée tout aussi immersive à Minsk aussi, là où se noue le destin des deux jeunes femmes qui sont au cœur de l'intrigue.

Et au fil des pages, le lecteur découvre une vraie question: la jeunesse doit-elle se mêler d'affaires policières exaltantes mais dangereuses? Entre envie de revanche personnelle et tentation de jouer le rôle de justicier, la partie va vite s'avérer inégale: elle va se jouer entre des truands motivés, des jeunes encore naïfs et la police stéphanoise. Aurait-il mieux valu la prévenir plus tôt? Cette question traverse la fin d'un roman qui relate quelques destins difficiles. 

De "Candeur fatale", le lecteur retient les naïvetés croisées de deux jeunes femmes rêvant à un avenir meilleur et d'une poignée de jeunes Stéphanois, garçons et filles, croyant pouvoir remplacer la police. Atypique pour un polar, l'issue sera dramatique pour toutes et tous. Cela, au terme d'une intrigue rondement menée dont la narration se dévore grâce à une écriture efficace qui décrit à merveille la vie d'une poignée de personnages attachants – les gentils surtout, on finit par bien aimer, ces jeunots – et solidement construits dans tous les cas.

Didier Esposito, Candeur fatale, Saint-Etienne, Editions du Caïman, 2024.

Egalement lu par Pierre FaverolleSonia Pupier.

6 commentaires:

  1. Il est vrai que certaines rues stéphanoises sont particulièrement difficiles à trouver...

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    1. Je ne m'avoue pas vaincu! :-) Merci pour ton commentaire, Alex, et bon week-end à toi.

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  2. Coucou,
    un livre avec Sainté en paysage et une maison d'édition très Stéphanoise portée par Jean-Louis Nogaro qui a su très bien mettre mon ex ville en avant (ou du moins en personnage important)
    La rue José Frappa j'ai du déjà y passer.
    Bisous d'une ex stéphanoise

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    1. Bonjour Didi! En effet, lecture après lecture, je m'aperçois que les éditions du Caïman sont une valeur sûre. Tu n'es plus à Saint-Etienne?
      Bonne semaine à toi, et bonnes lectures!

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  3. Oui oui je suis déjà passer dans cette rue, qui relie la Grande rue un peu plus haut que la Place du Peuple et la Rue Michelet

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