vendredi 2 mai 2025

Frédéric Roussel, un destin singulier sur une planète inconnue

Frédéric Roussel – Un voyage dans l'espace, sur une exoplanète qu'il s'agit d'explorer? Tel est le scénario d'"Amormina B", dernier roman de l'écrivain Frédéric Roussel. Associant texte et dessins, l'auteur offre à son lectorat un nouvel opus à la fois rapide et profond, soulevant quelques questionnements existentiels intéressants dans le contexte de la science-fiction. Par exemple, qu'est-ce qu'un extraterrestre? Et peut-on le devenir lorsqu'on est un terrien?

L'intrigue d'"Amormina B" paraît simple, pourtant: vivant sur une planète lointaine, l'humain Leo Bakst est envoyé dans une région à explorer. Il y découvre un volcan qui titille sa curiosité, ramasse des cailloux et découvre qu'ils contiennent de l'eau. Et dans sa base, une araignée vit et s'épanouit. Dès lors, le doute s'installe: faut-il alerter d'autres explorateurs humains ou approfondir les recherches seul? Cette simplicité se retrouve dans un mode d'écriture fait de lignes courtes, comme des poèmes – ou alors comme des sous-titres comme on en voit au cinéma, brefs, simples et immédiats.

Mais voilà: cette intrigue, l'auteur en explore en profondeur toutes les potentialités, se demandant constamment ce que peut signifier chaque péripétie pour un humain loin de tout. Denrée familière sur Terre, l'eau apparaît ainsi comme un bien plus précieux que l'or sur cette planète que le soleil n'éclaire guère. Et l'âge des roches aquifères que Leo Bakst collecte donne le vertige...

L'écrivain s'intéresse également au physique et au mental d'un personnage de tempérament solitaire largué sur une planète où le temps est un peu plus lent que sur Terre, et évoque l'adaptation de Leo Bakst à cette situation, ainsi que ses questionnements: est-ce que le café s'écoule plus vite ou plus lentement dans sa tasse sur cette planète à découvrir? L'occasion de vivre de nouvelles sensations, à peine décalées de celles qu'on vit sur Terre, sont nombreuses. Et le risque de se perdre dans un dédale de cavernes n'est pas absent, ce qui crée un moment de tension dramatique forte au fil de la narration.

A la narration en lignes courtes vient s'ajouter, et c'est un délice pour le lecteur qui y trouve le moyen de s'immerger dans l'exploration avec le personnage principal, de petites vignettes en noir et blanc dessinées au pinceau par l'auteur apparaissent très souvent au fil des pages. Leurs compositions étudiées et leur trait velouté signent leur originalité; parfaitement intégrées, lisibles, ce sont elles qui donnent un supplément de corps à ce roman. Associant l'image au texte court, "Amormina B" prend dès lors presque les allures d'un film sous-titré sur papier.

Quant à devenir un extraterrestre, la fin du roman indique que c'est la planète qui, comme vivante à travers l'un de ces artifices pourtant bien connus dont la nature a le secret, choisit qui s'y assimilera et accomplira ainsi son destin. Rapide et direct, aisément accessible, le livre "Amormina B" se démarque par les questionnements philosophiques qu'il évoque, sous le couvert d'un récit de science-fiction.

Frédéric Roussel, Amormina B, Vevey, Hélice Hélas, 2025.

Le site des éditions Hélice Hélas.


4 commentaires:

  1. Totale découverte pour moi de ce roman de science-fiction dont le style m'intrigue et dont les questions sous-jacentes qu'il soulève semble non dénué d'intérêt.

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    1. Bonjour Audrey! Oui, la présentation est surprenante pour ce type de texte, mais on s'y fait - les dessins sont beaux, très travaillés, et les textes vont droit au but, sans complications. Un titre à découvrir, en effet! Je te souhaite une bonne fin de semaine.

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