Roger Faller – Les boîtes à livres recèlent parfois de vieux livres totalement oubliés, mais qui ne demandent qu'à être redécouverts, ne serait-ce que pour voir ce qu'ils ont encore à raconter. Il en va ainsi de "Point d'orgue", roman de l'auteur populaire Roger Faller, paru en 1966 au Fleuve Noir – la maison d'édition qui, on s'en souvient, a publié l'essentiel des romans de San-Antonio.
Astucieux ouvrage que celui-ci: l'auteur y réalise un mélange réussi de roman policier et de roman d'espionnage en mettant en scène un enquêteur nommé Steimer, Français d'origine, mis en présence de personnages plus ou moins énigmatiques qui meurent les uns après les autres: un indicateur physionomiste porté sur la boisson, une hôtelière, son frère artiste, quelques accortes jouvencelles fugacement aperçues et des transfuges. Tout cela gravite autour d'un ingénieur spécialiste dans l'optique et de sa femme, aveugle en fauteuil roulant.
Ce petit roman se déroule à Berlin, au temps où cette ville était ceinte d'un mur. Autant dire que la porosité de celui-ci constitue un enjeu de l'intrigue: qui peut passer dans une direction ou dans l'autre de façon légitime? Et qu'en est-il de cette hôtelière qui, sise à l'ouest, achète à tour de bras des biens immobiliers de situés à l'est? Le lecteur voit Steimer errer longtemps avant d'avoir le fin mot, explosif, de l'affaire.
L'écriture de ce roman s'avère efficace. Elle fait usage d'un vocabulaire qui paraît plutôt riche aujourd'hui, et n'hésite pas à recourir au passé simple pour raconter l'histoire – ce qui n'enlève rien au dynamisme de la narration: rien de poussiéreux là-dedans. Enfin, sans s'appesantir dans leurs détails , l'auteur cite avec justesse les lieux où se passe l'intrigue, du côté de Berlin-Ouest et évoque, quand c'est nécessaire, qui commande où.
Un détail encore: comme l'auteur ne se perd pas dans les détails technologiques qui encombrent parfois les romans à suspense d'aujourd'hui, il a le temps de s'occuper de ses personnages, suffisamment pour leur donner, l'espace d'un livre, la personnalité approfondie qu'ils méritent.
Roger Faller, Point d'orgue, Paris, Fleuve Noir, 1966.
Je ne suis pas une grande fan de romans d'espionnage mais ce que tu en dis est assez tentant. Si je tombe dessus, pourquoi pas !
RépondreSupprimerEt sur le langage beaucoup plus riche autrefois... On est bien d'accord.
Bonjour Nathalie! Je l'ai trouvé dans une boîte à livres... peut-être auras-tu aussi cette surprise? L'auteur était assez prolifique. Et oui: ça surprend d'avoir une telle histoire au passé composé. Bonne semaine à toi!
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