mercredi 10 avril 2024

Olivier Pitteloud, l'esthétisme autour d'une famille où passent les générations

Olivier Pitteloud – C'est aux éditions Bernard Campiche que l'écrivain d'origine valaisanne Olivier Pitteloud, aujourd'hui enseignant à Fribourg, a fait paraître son troisième roman, "Combler la faille". Il s'agit d'un ouvrage résolument esthétique, court mais dense, crépusculaire aussi.

Si dense qu'il paraît difficile de résumer l'intrigue qui porte "Combler la faille". Voyons: le lecteur embarque à la suite d'une animatrice radio qui apprend, alors qu'elle anime une émission face à des interlocuteurs ennuyeux, que sa mère est morte. La voilà qui monte dans sa Buick huit cylindres vers un village où l'attendent quelques secrets inattendus, homicide inclus. L'arme du crime? Un coussin. 

L'écrivain travaille son écriture en esthète, artisan du ressassement qui vise à trouver la tournure la plus propre à ce qu'il faut dire. Par moments, les mots font dès lors émerger des images qui vont marquer, voire séduire le lecteur. Il y a par exemple la conception du travail du bois chère au patriarche, portée par un procédé manuel qui respecte le sens des veines pour que le matériau n'éclate jamais. 

Il y a aussi ce piano sur lequel on hésite à jouer, porteur de souvenirs de famille forts, liés à la contrainte des exercices quotidiens et peu gratifiants. Enfin, le lecteur se souvient d'une énigmatique jeune fille qui vit dans la demeure familiale, appelée à disparaître alors qu'une génération s'efface. Cela fait image: les parents n'ont jamais voulu renoncer à l'artisanat du bois, ni à un certain type de croisillon aux fenêtres. Alors que Papa, mort en bon homme d'une maladie diagnostiquée trop tard, et Maman sont décédés, il est temps d'inaugurer une nouvelle page.

Ces éléments d'intrigue sont livrés par l'auteur de façon fragmentée, comme si c'était le personnage principal, cette animatrice de radio, qui les découvrait peu à peu et les laissait résonner en elle. 

L'écriture est dense, on l'a dit, préservant la narration de tout éclat hors de propos et la plaçant dans le rythme lent et implacable d'un fleuve – le Rhône, peut-être? Elle est travaillée par la recherche du mot exact quitte à que les phrases semblent se reprendre et rechercher, un mot après l'autre, l'image exacte correspondant à ce qui se trame.

Olivier Pitteloud, Combler la faille, Sainte-Croix, Bernard Campiche Editeur, 2024.

Le site des éditions Bernard Campiche.

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