Gordon Zola – La recette d'un bon roman d'espionnage? Une intrigue rocambolesque, des jeux de mots par tombereaux et un état d'esprit quelque peu gaulois, pour faire rire et, tant qu'à faire, pour faire réfléchir aussi. C'est en tout cas ce mélange réussi qui sous-tend "L'espion quitte Mémé", roman dans lequel, pour la deuxième fois, l'écrivain Gordon Zola met en scène son personnage de Jane Bomb, une James Bond au féminin.
L'intrigue? L'auteur assume qu'elle soit aussi embrouillée que celle d'un film avec James Bond. Il y sera question d'une organisation criminelle, le SPOULPE, qui s'adonne au mal pour le plaisir que ça procure, en l'espèce en menaçant un projet de parc éolien au large du Royaume-Uni. Est-ce si important? Au contraire: ce n'est qu'un McGuffin, soit un de ces artifices narratifs qui leurrent le lecteur pour le faire tourner les pages.
L'auteur va même jusqu'à placer cette histoire d'éoliennes très loin en arrière dans les intérêts de l'intrigue en promenant son lecteur ailleurs: tout se passe en Egypte, où se déroule le tournage d'un film d'espionnage. C'est avec adresse qu'il mêle le réel et l'univers fictif en cours de construction, avec des acteurs qui jouent des rôles qui pourraient être ceux qu'ils ont dans leur vraie vie, et vice versa. En particulier, et c'est un principe directeur de la série, les acteurs qui ont joué James Bond au cinéma sont, dans la série des Jane Bomb, de véritables agents secrets au services de la Couronne. Et il faut bien les protéger...
Le décor égyptien permet à l'auteur d'installer une atmosphère saturée d'humour exotique à déguster au deuxième degré, comme un cocktail "Cléopâtre". Ainsi, lorsque Hassim Bey Shamel explique ce que sont réellement les moucharabiehs à Wesley Ptikuing, son visiteur occidental, il est permis d'y voir le reflet d'un Occident qui tend à se poser un donneur de leçons face au monde entier. Dès lors, qui est ridicule? Finalement l'Européen moyen, peut-être, avec ses grands pieds. Quel contexte? Il est aussi question, dans "L'espion quitte Mémé", de literie pour des sous-marins nucléaires, ce qui ouvre la porte à quelques situations et dialogues délicieusement équivoques...
"L'espion quitte Mémé" revisite ainsi sur le mode humoristique les codes du roman d'espionnage à la façon James Bond, allant jusqu'à châtier, par le rire, les travers d'un personnage omniprésent dans le récit via ses avatars cinématographiques, en particulier Roger Moore. Certaines scènes rappellent même fortement, à quelques détails cocasses près, des images de films d'anthologie. Et ce roman assume aussi d'être de son époque, avec des allusions au Brexit ou à Vladimir Poutine.
Bien sûr, le ton est à l'humour. Et qu'est-ce qu'on se marre! Un humour de situation quand il le faut (on rit des vieilles gloires ici, comme des femmes graciles ou en surpoids...), mais surtout un humour à base de jeux de mots, tantôt potaches ("comment, il a osé!?" se dit-on à plus d'une reprise face à tel à-peu-près particulièrement culotté), tantôt subtils voire velus, à telle enseigne que le lecteur se surprend à plus d'une reprise à relire une phrase, éventuellement à voix haute, pour s'assurer qu'il n'a rien loupé.
Gordon Zola, L'espion quitte Mémé, Paris, Le Léopard Masqué, 2017.
Le site des éditions du Léopard Masqué.
Le titre laissait déjà présager un roman assez rocambolesque et plein d'humour. Merci pour la découverte
RépondreSupprimerBonjour à toi, merci pour ton commentaire! En effet, le titre annonce la couleur! L'auteur avait aussi fait toute une série de romans parodiques inspirés par le monde de Tintin, et c'était également très amusant!
SupprimerJe te souhaite un bon week-end!
Bon week-end à toi aussi
SupprimerMerci beaucoup!
SupprimerJe connais l'auteur de nom et j'ai certains de ses romans parodiant l'univers de Tintin. Il a l'air de manier l'humour avec art ou du moins avec une redoutable efficacité !
RépondreSupprimerBonjour Audrey! En effet, Gordon Zola est un as de l'humour, et "L'espion quitte Mémé" ne démérite pas en la matière. Il sera présent à la Fête du Livre de Saint-Etienne cette année à nouveau, comme chaque année...
SupprimerBonne semaine à toi!