mardi 10 novembre 2020

Ai Weiwei, migration et humanisme

Mon image

Ai Weiwei – "Notre humanité" vient de paraître dans sa version française. Il s'agit d'un recueil d'aphorismes et de séquences tirées de différentes interventions publiques de l'artiste dissident et blogueur chinois Ai Weiwei, très engagé sur le front de la thématique des migrants, qu'il aborde avec un regard humaniste. Ces fragments ont été choisis et agencés par l'acteur Larry Warsh, qui a également signé la préface de ce petit livre.

C'est de migrants qu'il s'agit, en effet, et en particulier de réfugiés. En préambule, une poignée d'aphorismes indiquent la conception que l'auteur a de l'humanisme, et sur laquelle il insiste: c'est l'idée que l'humanité est une, indivisible, et que chacun est responsable de l'autre, proche ou (en l'espèce) lointain. Corollaire: elle ne saurait être divisée, par des frontières ou des religions par exemple.

Incidemment, l'auteur, artiste tous azimuts, évoque aussi le rôle de l'artiste, qui est d'avertir. A lire les aphorismes, le lecteur ignorant peut croire que l'auteur jouit de la posture confortable de l'écrivain donnant des leçons derrière son clavier. Mais qu'on se détrompe: considéré comme dissident dans son pays, la Chine, Ai Weiwei est allé sur le terrain, et s'est fait le porte-parole des migrants qu'il a rencontrés, entre autres par le biais d'un documentaire. Et la migration forcée fait partie de son histoire familiale, marquée par le maoïsme et la Révolution culturelle.

Dès lors, dans le chapitre "Crises", le lecteur découvre des faits nus, relatés de façon dure. Au fil des pages et des phrases, l'auteur se fait même juge, en particulier envers l'Europe et les États-Unis (au travers d'un Donald Trump constructeur de murs, qu'on devine même s'il n'est pas nommé), accusés, en tant que pays riches, de ne pas en faire assez en matière d'accueil. Il a aussi une phrase pour les pays du golfe Persique, jugés peu accueillants alors qu'ils sont culturellement proches de certains migrants.

Le propos prône aussi l'ouverture des frontières. Cela peut paraître convenu, mais l'auteur va plus loin que la géographie, suggérant aussi les frontières de l'économie et toutes les barrières, y compris celles du cœur. Enfin, en penseur libre, rejetant l'indifférence qui sépare, l'auteur exprime dans un dernier chapitre "Action" son exhortation à agir, dans le souci d'une humanité une.

Ai Weiwei, Notre humanité, Paris, Éditions Intervalles, 2020. Préface de Larry Warsh, traduction de l'anglais par Olivier Colette.

Le site d'Ai Weiwei, celui des éditions Intervalles.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Allez-y, lâchez-vous!