Le grillon
Triste à ma cellule,
Quand la nuit s'abat,
Je n'ai de pendule
Que mon cœur qui bat;
Si l'ombre changeante
Noircit mon séjour,
Quelque atome chante,
Qui m'apprend le jour.
Dans ma cheminée,
Un grillon fervent
Faisant sa tournée
Jette un cri vivant:
C'est à moi qu'il livre
Son fin carillon,
Tout charmé de vivre
Et d'être grillon.
La bonté du maître
Se glisse en tout lieu;
Son plus petit être
Fait songer à Dieu.
Sait-il qu'on l'envie,
Seul et ténébreux?
Il aime la vie,
Il est bien heureux!
La guerre enfiévrée
Passait l'autrefois,
Lionne effarée,
Broyant corps et voix;
Mon voisin l'atome
Fut mon seul gardien,
Joyeux comme un gnome
A qui tout n'est rien.
Dieu nous fit, me semble,
Quelque parité:
Au même âtre ensemble
Nous avons chanté.
Il me frappe l'heure,
Je chauffe ses jours;
Mais, femme, je pleure;
Lui, chante toujours.
Si jamais la fée
Au soulier d'azur,
D'orage étouffée,
Entre dans mon mur,
Plus humble et moins grande
Que sa Cendrillon,
Oh! Qu'elle me rende
Heureuse, ou grillon!
Marceline Desbordes-Valmore (1786-1859). Source: Bonjour Poésie.
je ne connaissais pas la poétesse. Merci pour la découverte
RépondreSupprimerDe rien! Je te souhaite un bon dimanche!
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