lundi 2 décembre 2024

Conan le Barbare, un pastiche en mode bien informé

Edgar Rider Howecraft – Je suis un peu comme Elisa A., femme clairvoyante et traductrice du roman "Once Upon a Time in Serjilla": à moi non plus, on ne la fait pas. J'en arrive même à songer qu'il n'y a pas de roman source écrit en anglais pour "Dans les ruines de Serjilla", court ouvrage signé Edgar Rider Howecraft. Et assez vite au fil de ma lecture, je capte l'astuce: j'ai entre les mains le numéro 21 de la série de livres populaires "Damned" (livraison de novembre; j'ai un peu de retard...), et c'est un impeccable pastiche des aventures de Conan le Barbare, qu'on peut aussi voir comme un hommage. 

Le nom de l'auteur peut mettre la puce à l'oreille: il mêle les noms de plusieurs auteurs américains de romans d'action. Le nom de famille Howecraft s'avère un mélange de Howard et de Lovecraft, comme si ces deux écrivains avaient fini par fusionner: le créateur de Conan le Barbare assume de s'être inspiré de H. P. Lovecraft. Quant aux éléments à base de Edgar Rider, ils permettent de penser à Edgar Rice Burroughs, créateur de Tarzan, et à "Easy Rider" pour ceux que ça amuse.

"Dans les ruines de Serjilla" est un roman violent qui évolue dans une époque mal définie où les peuples ne s'appelaient pas comme maintenant. Jon, l'alter ego de Conan le Barbare, se présente ainsi comme un Cimmérien, ce qui paraît placer l'intrigue du côté des côtes anglaises. Mais voilà: certains éléments expédient le déroulement du roman du côté de Byzance, à compter par le site même de Serjilla, où se déroule le combat ultime, dans une ambiance qui emprunte pas mal au conte russe de Baba Yaga (renommée Baba Naya) et de sa maison à pattes de poule...

L'auteur s'amuse avec l'onomastique, jouant avec les allusions romanesques et aventureuses. Celle-ci peut paraître grave avec Baal-Seth ou avec Toth-Amon, témoins d'un syncrétisme qui intrigue, mais aussi tout d'un coup moins sérieuses avec un maître nommé Aris-Thôt, allusion transparente à un grand philosophe grec. Enfin, certains noms de personnages secondaires rappellent, de manière finaude ou transparente mais jamais discutable, les humains qui ont fait de Conan le Barbare un personnage de cinéma fameux.

Enfin, deux mots sur l'intrigue (qui a dit "Il était temps"?): c'est Jon que le lecteur suivra, un adolescent qui embrasse sa mère qui n'aime pas ça (pas assez viril...) puis part dans sa mission: retrouver la tiare du basileus Buscem'a. Ce qui vaut au lecteur un ouvrage rempli de belles scènes de bagarres menées à la loyale, vigoureuses mais chevaleresques, où même un personnage qui a le dessous respecte la supériorité de son adversaire. Il n'empêche: l'auteur s'offre le plaisir de se montrer complaisant face à l'exhibition de sang et de viscères indissociable de toute baston un peu sérieuse. 

Et au terme d'une micro-odyssée de 78 pages, force est de constater que Jon a grandi, à force de compter les morts autour de lui, humains ou animaux. Reprendra-t-il les terres d'Aquilonie, s'aventurera-t-il du côté des Pictes? Ce sera peut-être le fait d'un prochain épisode.

Edgar Rider Howecraft, Dans les ruines de Serjilla, Lausanne, Nouvelles Editions Humus, 2024. Traduit de l'américain par Elisa A., femme clairvoyante à qui on ne la fait pas.

Le site des Nouvelles Editions Humus.

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