samedi 4 août 2018

Depuis Venise, une architecture ouverte sur le monde avec CA'ASI

medium_caasi_9f06d
Hugo Lacroix – Quelques mots aujourd'hui sur un beau livre, très beau même: celui que l'atelier "CA'ASI" a publié pour ses dix ans d'existence. Qu'est-ce que c'est? En feuilletant les pages de "CA'ASI, la maison commune", ouvrage bilingue français-anglais édité avec soin, on découvre un cabinet d'architectes ouvert tous azimuts, désireux de dévoiler pleins d'univers urbains et architecturaux. Le nom même du studio est un programme: "Ca'" signifie "maison" en vénitien, et "ASI" indique "Architecture Studio Italie". Tout est dit, y compris le sens que le studio donne à sa situation à Venise, vue comme une importante ville-monde, lieu de la mondialisation avant l'heure. Et à la fois synthétique et efficace, l'auteur Hugo Lacroix dit l'essentiel, en un bel entrelacs.


Dix ans à Venise, pour CA'ASI, c'est aussi dix ans d'activités et de promotion de jeunes architectes. Avant tout, il convient de signaler que de 2009 à 2018, les expositions annuelles proposées par "CA'ASI", atelier sis en plein cœur de Venise, brillent par leur diversité. Diversité d'approches, tout d'abord: les expositions mettent tantôt en valeur des photographes d'ici, tantôt des architectes d'ailleurs, dans un magnifique souci de se réinventer année après année. Le lecteur de "CA'ASI, la maison commune" découvre ainsi des photographies de bâtiments d'ici, comme le Parlement européen (vu par Georges Fessy) ou le quartier de la Défense (vu par Alex McLean, un regard décalé pour secouer un monde bâti qui, aujourd'hui encore, ne fait pas l'unanimité).

Mais il n'est pas question de regarder uniquement vers le passé: certaines images sont le reflet de projets de jeunes architectes venus d'Afrique, d'Amérique du Sud ou de Chine (très belles photos de Zhenfel Wang, entre froide géométrie et images plus organiques); mis à l'honneur les 2012, les jeunes architectes de culture arabe ne sont pas oubliés, à l'instar de Youssef Tohme. Ce sont tantôt des ébauches, tantôt des images de projets pour ainsi dire aboutis. D'un point de vue tout aussi international, la Stéphanoise Valérie Jouve donne son point de vue sur la construction de la tour du Rotana Hotel d'Amman (Jordanie), sans oublier d'immortaliser les ouvriers du chantiers. On aime aussi le regard de Stéphane Couturier sur certains bâtiments d'Alger, créateurs d'une musique sur la base de bâtiments vétustes que les habitants se sont réappropriés.

"CA'ASI, la maison commune" se montre ouverte aux architectures les plus diverses, mais aussi à leur utilité, tout en assumant un point de vue critique sur certains projets qui ne font pas toute leur place à l'humain – quitte à ce que cela semble, pour le lecteur, une façon de trahir un regard plus politique qu'architectural (exposition 2016, sous le patronage d'Alejandro Aravena). Il est certes permis de considérer avec suspicion la méfiance exprimée par le livre à l'encontre des maisons à construire soi-même, destinée aux réfugiés et migrants. En revanche, lorsque la Chine se montre avide de pastiches et que Architecture Studio dit "non", on ne peut que le suivre, pour peu que l'on veuille une architecture dotée d'une vraie personnalité.

Le studio Architecture Studio Italie assume sa présence à Venise, et lui donne même un sens d'ouverture sur le monde. Les architectes sont vus comme les "Français" de service? Pas de problème! Ils préfèrent assumer leur présence dans une ville qui, selon eux, constitue un chef-d'œuvre architectural, même si aucune de ses parties n'apparaît comme exceptionnelle: l'essentiel, c'est l'ensemble. Créative, l'équipe d'"Architecture Studio Italie" a le souci de l'intégration au patrimoine bâti, dans la lignée de l'histoire. Et à l'instar de Venise, ville ouverte sur le monde, "CA'ASI" attire des architectes de partout, désireux de créer des bâtiments dans le monde entier dans un souci de nouveauté. Organisés chaque année selon un angle sans cesse différent, des concours ont le souci de donner leur chance à de jeunes talents. Alors? Si certains pensent que Venise n'est qu'une ville-musée, on leur répondra qu'en tout cas dans un coin de la cité, du côté du Campiello Santa Maria Nova, il y a du nouveau...

Hugo Lacroix, CA'ASI, La maison commune, Venise, CA'ASI, 2018. Traductions par John Tittensor.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Allez-y, lâchez-vous!