mardi 28 novembre 2017

Londres sous le soleil, le temps d'un polar

Catherine May – Il est peu probable que l'écrivaine suisse romande Catherine May ait quelque lien avec Theresa May, son homonyme, actuelle locataire du 10 Downing Street. Enfin, quoique: outre le nom de famille, il y a désormais Londres. En effet, "London Docks", deuxième roman de Catherine May, est un roman policier dont l'intrigue se déroule dans la capitale anglaise, au temps de Margaret Thatcher. 

Il y a beaucoup d'idées originales dans "London Docks", à commencer par le profil du tueur, dont la personnalité va se dévoiler tout au long du roman, parallèlement à la progression de l'enquête: nous avons affaire à un créateur, à la fois doué pour manier les pinceaux et les aérosols, et à un assassin retors qui scotche ses victimes entre elles. Le lecteur le connaît rapidement, mais pas les policiers; dès lors, l'intérêt de "London Docks" consiste à suivre l'approche d'une police qui piétine un peu.

Police, justement... l'auteure sait camper des personnages aux qualités bien marquées, autour de la personnalité particulièrement étudiée de l'inspectrice (la quatrième de couverture dit curieusement "inspecteure") Lynn Armitage. Parachutée à Londres après une expérience difficile dans une autre ville, elle s'avère un peu solitaire, capable de sentiments et d'empathie, un peu trop même. Et surtout, atteinte d'hyperosmie, c'est littéralement une agente qui a du flair! A ses côtés, on trouve un inspecteur aux manières d'ours mal léché et une hiérarchie pessimiste. L'ambiance est donc celle d'une équipe qui avance humblement sous les cieux londoniens.

Les cieux, justement... s'il y a bien un élément qui donne l'ambiance dans ce roman, c'est la météo, omniprésente. L'auteure s'est en effet renseignée sur le temps qu'il a fait jour après jour en été 1982, période où se situe l'action, et les descriptions de la canicule, surprenante dans une ville qu'on croit condamnée au brouillard et à la pluie, ne sont pas pour rien dans l'ambiance un brin lourde qui marque "London Docks". Il est permis de songer aux atmosphères torrides de "Canicule" de Donald Windham, où les effets du soleil se font sentir sur les personnages...

Et sous le soleil londonien, ce sont des œuvres d'art qui voient le jour. Là aussi, l'auteure s'est quelque peu renseignée sur les usages des artistes du graffiti, afin de construire un criminel crédible à la vie secouée, marquée par une mère humiliante et alcoolique, fabulatrice qui plus est. Ce qui nous amène aux éléments les plus glauques du roman, à savoir cet hôpital psychiatrique où il faut faire toujours plus avec toujours moins de moyens, quitte à rudoyer les patients, ou ces logements sociaux où les plus modestes vont s'entasser. Ou ces docks désaffectés, hantés par des marginaux, que l'auteure dessine.

"London Docks" s'avère un roman un poil long peut-être (l'enquête n'avance pas vite, c'est le moins qu'on puisse dire, et elle ne dispose pas de toute la technologie actuelle); mais tout y est pour que le lecteur se trouve en présence d'une bonne histoire, pas forcément tendue comme une corde à violon (en particulier, l'auteure fait l'impasse sur la description d'une possible pression médiatique), mais riche en belles atmosphères et habitée par de beaux personnages. Et puis, Londres sous le soleil, ça compte...

Catherine May, London Docks, Lausanne, Plaisir de lire, 2017.

Le site des éditions Plaisir de lire.

2 commentaires:

  1. Oui mais Londres sans pluie ne serait plus Londres....

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    1. En effet... c'est pourquoi il y en a quand même aussi un peu!

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