Gilles de Montmollin – Nous voilà à bord d'un dirigeable: c'est là que commence le dernier roman de Gilles de Montmollin, "Un été 1928". Un ouvrage court, bien dans la veine de l'écrivain: beaucoup d'aventures, de la technique décrite avec le réalisme des mots précis, et quelques filles trop jolies pour être honnêtes afin de pimenter le tout.
Et sur ce coup-ci, l'écrivain choisit l'originalité en embarquant son lectorat, pour commencer, dans la cabine de pilotage d'un dirigeable, l'Italia en train de tomber dans le grand nord européen. L'écrivain emprunte cet épisode à l'histoire de ce moyen de transport, moyennant quelques adaptations. Et il réussit à faire en sorte que le lecteur se sente littéralement à bord de cet aéronef: mode de conduite, aperçus du fonctionnement, descriptions des mouvements, ambiance parmi des passagers forcément désécurisés par la catastrophe imminente.
L'Italia semble le pendant symétrique du Deutschland, qui paraît en fin de roman pour une opération de sauvetage assez folle. Mais n'anticipons pas...
C'est par certains passagers de l'Italia que l'on entre dans le domaine de la fiction. Plus précisément, voilà qu'Albert Schneider est sauvé de la catastrophe par Antoine Esnault, un aviateur français viré de l'Aéropostale. Il apparaît qu'une dette d'honneur rapproche ces deux personnages, Schneider ayant laissé la vie sauve à Esnault lors d'un combat aérien pendant la Grande Guerre. Les voilà liés, bon gré mal gré, pour le meilleur et le pire. En effet, Albert Schneider se révèle un fidèle disciple d'escrocs tels qu'Alexandre Stavisky ou Charles Ponzi.
Commence la cavale... et les créanciers ont faim. Parmi eux, Adolf Hitler et Hermann Goering, désireux de récupérer des fonds placés chez Schneider en vue de les faire fructifier. L'auteur les dépeint avec quelques traits de caractère attendus, tels que les éructations colériques et antisémites d'Adolf Hitler. En effet, la présence d'un certain nombre de personnages historiques contribue au réalisme du roman. Dans un registre plus sympathique, par exemple, on y croise Antoine de Saint-Exupéry. Et une partie de l'équipage de l'Italia est véridique.
Et si la technique occupe une jolie part de "Un été 1928", cela n'empêche pas l'auteur de décrire les Années folles par d'autres biais, sur tout un continent mais avant tout à Paris. Il y aura une incursion endiablée au Boeuf sur le toit, bien sûr! L'époque, c'est aussi le vestiaire qui évolue, les chapeaux cloches, les robes courtes. À la pointe de la mode, "Un été 1928" montre même des femmes en short, sous les regards admiratifs de ces messieurs. Bien sûr, certaines femmes du roman fument, par exemple l'androgyne Ethel Floyd, ce qui est assez nouveau et trahit la patte du publiciste Edward Bernays, qui a ouvert les portes du tabagisme aux femmes. Et plus largement, ce sont les mentalités de l'époque que l'auteur esquisse, notamment au détour de certains dialogues.
Technique et moyens de transport, modernité façon entre-deux-guerres: l'auteur propose avec "Un été 1928" un roman d'aventures parfois audacieux, mais toujours soucieux d'un réalisme qui fait qu'à bord d'un avion de combat ou d'un dirigeable en perdition, ou même au volant d'une voiture, le lecteur croit toujours y être pour de vrai.
Gilles de Montmollin, Un été 1928, Lausanne, BSN Press, 2019.
Le site de Gilles de Montmollin, celui des éditions BSN Press.
Egalement lu par Francis Richard.
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