jeudi 30 octobre 2025
Mademoiselle, aimante et bien dans ses santiags
dimanche 26 octobre 2025
Dimanche poétique 714: Clément Marot
samedi 25 octobre 2025
Deux amoureux déterminés par l'Histoire
Yves Paudex – L'amour et les déterminismes familiaux peuvent-ils faire bon ménage? Les secrets de famille gagnent-ils à être débusqués? "Du sang sur les miens" apporte à tous ces questionnements des réponses nuancées et détaillées à partir de la destinée de David Dormond, dit DaDo, et d'Angelika Lindell, dite Angie. Et comme il s'agit d'un thriller, l'auteur conduit son lectorat à travers les zones d'ombre les plus terribles de ses personnages et, à travers ceux-ci, de la grande Histoire.
En effet, rien n'aurait dû rapprocher David Dormond, photographe juif né d'un père ténor du barreau défunt avant l'âge et petit-fils d'un aïeul mort à Mauthausen, et Angelika Lindell, descendante d'un officier SS qui a peut-être tué de ses mains l'ancêtre de David. Des éléments qui finissent par se savoir, d'autant plus que David, subjugué par le mal, se montre curieux, jusqu'à l'excès, face à une Angie qui n'est elle-même pas en paix avec son histoire familiale. Et qu'il s'intéresse aussi à l'histoire de sa propre famille, qui a à nouveau eu maille à partir avec l'avocat Dormond après la Seconde guerre mondiale.
L'auteur a ses ressources pour relater l'horreur nazie, assumée et pratiquée par l'un des personnages: il cite les Mémoires qu'il a écrits, glaçants dans leur souci du détail réaliste relaté avec la simplicité de celui qui se sent dans son droit. Solidement documenté (on pense aux épisodes en Lituanie, à rapprocher du "Journal de Ponary" de Kazimierz Sakowicz), cette partie du texte s'intéresse aussi au recyclage des anciens nazis, évoquant entre les lignes une dénazification pas toujours impeccable, même en Allemagne. Quant à l'ascendance masculine d'Angelika Lindell, un gros angiome mal placé semble servir, symboliquement, de marque d'infamie.
"Du sang sur les miens" est structuré autour du cycle d'une histoire d'amour, ce qui rend les deux personnages principaux attachants, avec leurs qualités et leurs défauts. Celle-ci permet par ailleurs à l'écrivain de développer un récit à la tension grandissante qui se développe, jusqu'à sa difficile issue, en creusant la noirceur de l'humanité.
Une noirceur insoupçonnable a priori dans le décor que l'écrivain a choisi pour son intrigue: il n'y a rien de plus pénible que les vignes et les villages de Lavaux, où certains personnages se révèlent aussi fins épicuriens, amateurs de bons restaurants comme de bons alcools – alors que d'autres utilisent des breuvages moins délicats pour, simplement, vivre avec l'horreur et ressasser la haine. Porté par une écriture efficace qui s'autorise un trait d'humour à l'occasion, "Du sang sur les miens" constitue un fascinant voyage à travers les méandres et les méfaits de certains déterminismes sociaux.
Yves Paudex, Du sang sur les miens, Bulle, Editions Montsalvens, 2025.
Le site des éditions Montsalvens.
Egalement lu par Francis Richard, Manuel.
dimanche 19 octobre 2025
Dimanche poétique 713: Charles Baudelaire
Je reviendrai dans ton alcôve
Et vers toi glisserai sans bruit
Avec les ombres de la nuit,
Et je te donnerai, ma brune,
Des baisers froids comme la lune
Et des caresses de serpent
Autour d'une fosse rampant.
Quand viendra le matin livide,
Tu trouveras ma place vide,
Où jusqu'au soir il fera froid.
Comme d'autres par la tendresse,
Sur ta vie et sur ta jeunesse,
Moi, je veux régner par l'effroi.
jeudi 16 octobre 2025
Nature et voyages oniriques avec la poétesse Marie Rouzin
Marie Rouzin – La poétesse Marie Rouzin voyage entre les mondes de la poésie et de la narration avec son dernier ouvrage, "Traversées". Le premier texte de ce recueil, "Comment traverser la nuit?", relate un voyage onirique et nocturne, éclairé de manière fugace, vers la fin, par une prise de conscience du corps. Ce texte poétique en vers libres, on le comprend à la fin, est celui d'une naissance à la vie, déjà porteuse d'une histoire, comme le suggère le "me voilà" final, chargé de tout ce qui est relaté avant.
Le lecteur découvre une narratrice qui se raconte au plus près d'elle-même et de sa chair, embarquée dans un voyage empreint de mystère où elle hale une barque sur des eaux qui mènent on ne sait où. D'emblée, le lecteur est embarqué à sa suite dans un monde caractérisé par la porosité entre l'humain qui y évolue et ce que l'auteure appelle la "communauté du vivant": des animaux certes, et même des minéraux dont l'évocation confère au poème la saveur particulière, peu aisée mais nécessaire, de la vase qu'on doit avaler pour avancer.
Et ce monde tend à être hostile, comme s'il s'agissait de l'être pour contraindre la narratrice à avancer vers son destin, à être davantage elle-même. On sourit à l'image, avancée par un cheval de halage, du cœur qui bat comme les vieux sabots d'un cheval. Quant au rejet, il apparaît paroxystique lorsqu'on entend une corneille énoncer "voix voix voix", suivi d'un "fuis fuis fuis fuis fuis fuis fuis" impérieux: soudain, le rythme s'accélère, la pression se fait plus grande sur la narratrice. Enfin, il y a ce clin d'œil des vanneaux qui, disant "hi hi hi hi hi", répètent à chaque fois, si l'on suit le poème, les initiales des mots "honte" et "infamie" qui viennent immédiatement après.
Le long poème "Fugue" qui vient compléter le recueil constitue un univers distinct de celui de "Comment traverser la nuit?", et les moyens graphiques mis en œuvre eux-mêmes l'indiquent: marqué avant tout par des tirets de dialogues, "Comment traverser la nuit?" cède la place à un "Fugue" aux marges échancrées et à un jeu de polyphonie marqué par l'usage des italiques. Et dans "Fugue", on parle à la deuxième personne du singulier: le lecteur, la lectrice sont invités à se sentir directement impliqués.
Le motif de l'écologie apparaît de manière prégnante dans "Fugue", dès le début, avec l'image de l'eau. Il s'oppose à ces vers libres rédigés en italique, puissants, qui décrivent voire dénoncent les travers de la vie humaine de notre temps, conditionnée par le consumérisme. Quant au final, incantatoire, il résonne comme une invitation à se réapproprier soi-même, par tous ses sens (et, il faut le dire, leur évocation est omniprésente dans "Traversées") en communion avec une nature réconciliée. Et là, c'est "l'oiseau sur ton épaule", symbole et promesse de liberté que le lecteur porte sans le savoir et que la poétesse révèle, qui parle.
Marie Rouzin, Traversées, Caluire-et-Cuire, Sous le Sceau du Tabellion, 2025. Préfcace de Matthieu Lorin. Dessins d'Arlette Lebouvier.
Le site des éditions Sous le Sceau du Tabellion. En partenariat avec Masse Critique Babelio.
dimanche 12 octobre 2025
Dimanche poétique 712: Jules Troccon
lundi 6 octobre 2025
Camille Paule, les prisons de nos vies
Camille Paule – Quel bel objet que le livre "Trois quarts de peine" de la poétesse Camille Paule! On y trouve le logo de l'éditeur gaufré en relief sur la page de garde, et une poésie qui accorde une grande importance au gris typographique, auquel la poétesse confère tout un sens. Les éléments illustratifs abstraits, en couverture, en page de garde et en toute fin de recueil, invitent au rêve. Enfin, chaque exemplaire est numéroté à la main, donc unique: le mien porte le numéro 181.
La poésie de Camille Paule est une manière de raconter une vie banale en lui donnant le relief du rythme des vers libres. La banalité prend forme à travers quelques images récurrentes, ponctuantes même, telles que le café ou les tasses non lavées à la maison.
L'expression de la vie banale de la personne qui s'exprime dans les poèmes de l'ouvrage est empreinte de liberté, à telle enseigne qu'elle n'hésite pas à placer, parfois, une virgule au terme d'un poème, d'une phrase: le poème est fini, mais pas l'expression. Certains blancs sont allongés au sein d'un vers, comme pour créer une attente. Il arrive aussi que l'anaphore soit utilisée pour forcer un rythme, comme dans "La petite sœur" (p. 52), texte bourré d'injonctions rigides.
Il en résulte des pages qui, avant même qu'on ne les lise, semblent belles à voir, et déjà porteuses de la lumière du sens. On sent ainsi qu'il reste un peu de place pour respirer dans la plupart des poèmes, mais que certains apparaissent plus lourds au regard, en particulier "Avez-vous mal quelque part?", écrit d'une seule traite, d'un souffle, sans ponctuation forte. On relève aussi, d'un coup d'œil, que ça crie en page 62, avec "Droit de visite" et ses abréviations indéchiffrables composées en capitales et en gras qui frappent douloureusement l'œil. La technocratie et ses acronymes sont-elles une prison?
Car c'est bien de cela qu'il s'agit, et le titre le suggère: la vie a quelque chose d'une prison, et l'auteure file la métaphore. Il y aura donc des parloirs, des droits de visite, un "Sursis probatoire". Cette image constante a cependant un adversaire libérateur dans "Trois quarts de peine": l'utilisation soignée, minutieuse, de tous les registres de langage. L'écriture poétique peut s'avérer précieuse, recherchée parfois, mais elle ne s'interdit pas de tomber les filtres pour dire "merde" lorsque ce mot s'impose.
C'est avec la force d'une écriture qui, mot après mot, va droit au but que se décline le premier recueil de Camille Paule, un recueil qui explore, succinct, les prisons plus ou moins invisibles ou manifestes qui retiennent chacun d'entre nous dans leurs barreaux: société, vie quotidienne parfois marquée par un peu de laideur, deuils et liens familiaux. Autrement dit, "Trois quarts de peine" promène un regard sur la vie qu'on mène aujourd'hui, acéré et suffisamment universel pour que tout un chacun s'y reconnaisse au moins une fois.
Camille Paule, Trois quarts de peine, Saint-Etienne, Maintien de la Reine, 2024.
L'Instagram de Camille Paule, celui des éditions Maintien de la Reine.
dimanche 5 octobre 2025
Une maison racontée, entre descriptions et vieux fantômes
Florian Sägesser – Et si, pour une fois, ce n'était pas un être animé, humain ou animal, qui était le personnage principal d'un roman? Inspiré peut-être par un vécu familial personnel, l'écrivain Florian Sägesser relève un défi rendu pressant par l'évolution du monde: "On ne se reconnaît bientôt plus ici...". Il en résulte un roman atypique, "Bel Horizon", dont le personnage principal, au point d'être éponyme, est une ferme située quelque part dans le Gros-de-Vaud.
Le lecteur comprend cette focalisation assez rapidement en suivant les descriptions minutieuses qui constituent le début, mais aussi les vastes repères récurrents du roman. Celles-ci se penchent sur l'édifice et sur ce qui l'entoure, les campagnes comme les forêts, menacés par l'installation de "fleurs": le lecteur comprend assez vite qu'il s'agit d'éoliennes. Enfin, l'auteur va jusqu'à personnifier la ferme de Bel Horizon en la désignant comme la "vieille dame". Une vieille dame qui, si inanimée qu'elle soit, a pourtant une âme, comme qui dirait.
Cette âme, l'auteur la révèle peu à peu en mettant en scène des personnages qui, à l'occasion d'un décès, doivent libérer les lieux. C'est l'occasion d'évoquer les fantômes qui le hantent: Mademoiselle Lili, le Druide et quelque autres, suffisants pour que l'auteur développe, par touches, ce qui a pu se passer au fil d'un long siècle qui a commencé en 1906. Un peu d'alcool, des fêtes, des joies et des peines au fil des saisons: les souvenirs émergent peu à peu, mettant en évidence une de ces vastes familles comme il y en a eu il n'y a pas si longtemps dans la campagne romande.
Et puis il y a l'écriture. Celle-ci est dense, marquée par une absence de dialogues qui impose une lecture lente et attentive. Les mots ont leur saveur dans "Bel Horizon", portés par les choix d'un écrivain qui ne recule en aucun cas devant les vocables du terroir qui sonnent juste. Avec les mots du cru vaudois, ce roman assume donc une ambition universelle, celle de décrire un lieu soumis aux aléas du temps qui passe, tout en s'efforçant d'en souligner la nature intemporelle. La relation des souvenirs y pourvoit, d'autant plus qu'elle est portée par une langue poétique lente mais envoûtante qui ne peut que séduire le lecteur qui voudra bien prendre le temps de la savourer.
Florian Sägesser, Bel Horizon, Chêne-Bourg, BSN Press, 2025.
Le site des éditions BSN Press.
Dimanche poétique 711: Patricia Guenot
(Alimentation contrôlée) sous le rideau de douche
Déchiré. Plus rien ne dure, les aléas de la modernité.
Les carottes cuisent sur le fourneau ventru.
Il râle, se relève dès que siffle un train.
Elle ne vient jamais quand il en a besoin.
Le chat s’étire, indifférent. L’eau coule
Sur la mémoire mais la douleur persiste.
Le café bouilli l’écœure, le pain crisse sous la dent.
Il achètera du thé sur la place des sirènes.
Le téléphone portable stridule dans la chambre.
La guerre succède au yaourt sans matière grasse
(Changer les piles de la balance) sous la pendule narquoise.
Le pas de la concierge éteint le chant du rossignol.
vendredi 3 octobre 2025
Fribourg interlope: trois friandises signées Michel Niquille
Michel Niquille – "Fribourg Canaille", c'est le petit dessert littéraire qu'on s'offre entre deux ouvrages plus costauds, avec le petit plaisir à peine coupable – canaille, précisément – de plonger dans trois nouvelles construites comme des mini-romans aussi rafraîchissants qu'une glace à trois boules dégustée dans un restaurant interlope de la cité des Zaehringen. A trois reprises, son auteur met en scène un inspecteur vicelard nommé Aloïs Ferragut, Jurassien échoué à Fribourg.
Certes, les intrigues de ces nouvelles sont d'inspiration policière, mais les intrigues sont assez rapides, marquées par les bavures d'un Ferragut que l'auteur n'épargne guère lorsqu'il s'agit de souligner son incompétence. Elles donnent au recueil un côté sombre, et c'est là leur rôle: ainsi naît la saveur de l'interdit, liée à l'invitation faite par l'auteur d'entrer dans des caboulots fribourgeois aujourd'hui disparus.
Mais c'est plutôt du côté des ambiances et des personnages qu'il faut rechercher l'originalité de cette trilogie de nouvelles. Jeunes filles rouées, familles aux ambiances électriques, noces foireuses avec une mariée au genre incertain, garçons aux hormones déréglées: l'auteur sait déceler la crapule même chez des gens d'apparence intègre. Force est ainsi de relever, en particulier, le souci de paraître de la famille Golay, investie corps et âme dans le métier de la charcuterie, pratiqué à la rue Saint-Pierre: c'est tout le propos de "Le charcutier de St-Pierre".
Le lecteur sourit aussi à l'accueil qu'on fait invariablement à Ferragut quand il entre dans un bistrot (c'est un running gag: on lui sert un pastis sans eau, de préférence à une table bien cachée parce que tout le monde a des raisons de lui en vouloir), ou à ce marchand de bétail qui ressemble à Francis Lalanne, assassin malgré lui, qui hante le Café des Sports, en face de l'école normale devenue mixte – autant d'éléments qui permettent de considérer que cette nouvelle se passe dans les années 1986, de même que les autres en fait.
Fidèle à lui-même, en effet, l'écrivain explore le Fribourg des temps que les moins de quarante ans ne peuvent pas connaître, où la police fonctionnait un peu en roue libre dans un esprit cow-boy: Ferragut, on le découvre au fil des pages, a tendance à sauter sur n'importe quel indice, même s'il n'est pas déterminant et même si, en vrai, il n'y a rien à signaler: qu'a-t-il à se mêler, par exemple dans "Panique au Café des Sports", des trois génisses qui se sont échappées de l'enclos de Samuel Tenz, dit Francis Lalanne?
Enfin, parmi les bistrots que l'auteur fait revivre au fil des pages à la manière d'un fil rouge contextuel, mentionnons le Buffet de 2e classe, dépendant de la gare de Fribourg, dont il fait un rendez-vous de cassos vivant de petits coups fourrés. C'est le cœur de la première nouvelle du livre, "Règlement de compte au Buffet de la gare", qui met en scène un boxeur rangé des voitures.
Portée par une écriture bien canaille qui, par instants, rappelle la truculence d'un Michel Audiard, chaque nouvelle transporte son lectorat dans un passé déjà un peu lointain, mais qu'il a peut-être vécu. Ce passé, ces contextes, ce sont sans doute ceux que l'auteur a côtoyés lui-même et qu'il fait renaître avec sa plume acérée, en en dessinant l'ambiance et les gens, tantôt adorables – mais il faut parfois chercher –, tantôt toxiques – et là, tous les coups sont permis.
Et enfin, le côté brut de décoffrage des textes est admirablement souligné par les illustrations d'inspiration expressionniste, façon gravure sur bois, d'Anaïs Lou.
Michel Niquille, Fribourg Canaille, Bulle, Editions de la Trême, 2025. Illustrations d'Anaïs Lou Illustration.
Le site d'Anaïs Lou.
Lu par Rebecca.
jeudi 2 octobre 2025
Des Romands et des nouvelles
Bénédicte Gandois – On l'apprend en préface: les onze nouvelles qui constituent le recueil "Je vous écris de Romandie" ont été écrites par Bénédicte Gandois pour le journal "L'Echo du Gros-de-Vaud" en pleine période de covid-19. A ce moment-là, en effet, la rédaction a choisi de combler une actualité soudain limitée par des nouvelles littéraires. Et force est de noter que l'écrivaine, sollicitée, a su répondre aux attentes en trouvant d'emblée le ton juste.
On le reconnaît en particulier aux personnages le plus souvent positifs et porteurs d'espoir que chaque nouvelle met en scène. On y trouve un écolier d'origine portugaise qui ne peut aller en vacances au pays (mais le pays pourrait venir à lui, à Romanel-sur-Lausanne, en quelque sorte...), un Timéo qui trouve à Corseaux une amie et de la magie dans sa vie, sans oublier une personne aussi âgée que déterminée lorsqu'il s'agit de faire une belle promenade.
Ces personnages se démarquent par leur diversité aussi: s'ils ont tous vécu en Suisse romande, ou y vivent, c'est bien leur seul point commun. Les âges de chacun varient, favorisant aussi des interactions intergénérationnelles aussi lumineuses que celle décrite dans "Le crocodile et le vieillard", où il suffit d'une journée passée avec son fils pour qu'un père comprenne mieux son métier.
Préhistorique, le crocodile en question ouvre enfin une autre porte: celle de l'histoire, que la nouvelliste franchit avec aisance. Il sera donc question de l'époque romande, de la famine qui frappa la Suisse en 1816 ou de la colonie suisse installée à Chabag, sur les rives de la mer Noire. Quant aux "Neiges d'Aventicum", récit d'un déracinement à l'époque romaine, elles témoignent de l'intérêt particulier que l'écrivaine porte pour l'époque romaine: elle lui a déjà consacré un roman, "La fortune de Moeris".
On sort avec le sourire de la lecture des onze nouvelles de "Je vous écris de Romandie", un recueil écrit de manière limpide dans le souci de s'adresser à un vaste lectorat, pas forcément coutumier du genre, et de l'émouvoir tout au long d'une période de confinements et de disciplines qui n'a pas toujours été facile à vivre pour les uns et les autres.
Bénédicte Gandois, Je vous écris de Romandie, Cossonay, La Maison Rose, 2023.
Le blog de Bénédicte Gandois, le site des éditions La Maison Rose.







