Ploum – Signé de l'écrivain belge Ploum, alias Lionel Dricot, "Stagiaire au spatioport Omega 3000" est un court recueil qui rassemble des nouvelles diverses. Ses sources d'inspiration sont variées: rêves, appels à textes, inquiétudes liées à la numérisation de la société contemporaine. Si les textes semblent avoir été recueillis un peu au hasard, ceux-ci sont reliés formellement entre eux par d'amusants simulacres d'identification numérique. Il y a même une piste cachée, comme sur les compact-discs d'antan...
"autres joyeusetés que nous réserve le futur": ce sous-titre annonce que les textes du recueil relèvent de l'émancipation. Dûment écrite en langage inclusif à grands renforts de points médians, la nouvelle éponyme du recueil décrit brièvement, de manière amusée et bien observée, une société outrageusement matriarcale au cœur de laquelle un brave garçon qui fait penser à Roger Wilco (le balayeur de l'espace de "Space Quest", vous savez...) cherche à s'imposer comme dame pipi des étoiles – sacré métier où il faut connaître les attentes et particularités de myriades d'extraterrestres en matière de buen retiro. Au fait, comment dit-on "dame pipi" au masculin?
Plusieurs nouvelles, parfois des textes de jeunesse, sont nées des rêves de l'auteur, quand elles n'assument pas un certain onirisme intrinsèque ("Les oiseaux"). D'autres résultent d'une manière de mettre en nouvelle certains classiques du monde des jeux vidéo, à l'instar de "Le figurant", qui observe vivre un personnage non jouable hors du rôle étroit qui lui est assigné dans un jeu dont le lecteur ignore tout par ailleurs. Quant à la nouvelle "Le mur du cimetière" expérimentale s'il en est, elle réussit à placer toute une histoire, elliptique, en une cinquantaine de mots.
"Stagiaire au spatioport Omega 3000" comprend aussi des nouvelles sur ce que sera l'humain dans un avenir lointain. On découvre ainsi une humanité vivant éclatée dans des vaisseaux spatiaux et découvrant soudain une planète où vivent des humains, avec leurs sexes, leurs races, la diversité qui fait le sel de la vie humaine ("L'humanité captive", qui met en scène un personnage sans sexe, perdu dans l'espace et aux ordres de sa hiérarchie). Enfin, quelques textes évoquent de manière critique et inquiète les évolutions de la numérisation impulsée par les GAFAM ou le monde du travail ("Les imposteurs" ou "Les filons chocolatifères de la Lune", qui assume une proximité plus ou moins délibérée avec un certain Willy Wonka).
Amusé ou inquiet, l'écrivain, également politicien engagé auprès du Parti Pirate, décrit ainsi par le mode de la littérature les inquiétudes du temps présent en imaginant ce qu'elles pourraient être si elles se réalisaient à terme, jusqu'à l'absurde. Assumant leur diversité qualitative (certaines idées auraient mérité d'être mises en valeur dans le cadre d'une intrigue de plus longue haleine), l'auteur ne manque pas, par ailleurs, d'indiquer au terme de chaque texte comment l'idée lui est venue. Ce qui ne manque pas de renforcer la connivence entre l'écrivain et son lectorat.
Ploum, Stagiaire au spatioport Omega 3000, PVH Editions/Ludomire, 2022.
Le site de Ploum, celui des éditions PVH/Ludomire.
Ils l'ont lu aussi: Alias, Julien Noël, Loïc Remy, Moko, Plumes de lune.
Un recueil qui a l'air intelligemment décalé ! Quant à l'auteur, j'apprécie sa démarche d'évoquer ce qui l'a inspiré. C'est original.
RépondreSupprimerBonjour Audrey! En effet, c'est un peu atypique, et l'idée d'évoquer le contexte d'écriture des nouvelles m'a aussi séduit. Bonne journée et bonne fin de semaine à toi!
SupprimerPas le moindre petit martien à se mettre sous la dent la-dedans?
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