Albert Ducloz – L'amour triomphant de la barbarie nazie dans un coin de Haute-Loire: tel est le motif que l'écrivain Albert Ducloz développe dans son roman "Les Amants de juin". Celui-ci installe son action en 1944, alors que l'occupant allemand est sur les dents en France: c'est le temps du débarquement de Normandie, mais les gars de la Das Reich impressionnent encore dans le village de Pinols, où ils exercent leur autorité avec violence, en particulier envers les résistants, dits "Terrorists".
Le nœud historique de l'intrigue des "Amants de juin" est situé autour du Mont Mouchet, objet d'assauts en juin 1944. L'auteur les décrit avec un souci de réalisme marqué, mentionnant même le nom de certains des résistants morts de la main de l'occupant. Réaliste, il donne à voir que les tactiques adoptées par les résistants vouaient ceux qui les suivaient à une mort probable: ce n'est pas parce que les Allemands, souvent des anciens du front russe, sont contraints de se replier vers la Normandie, où tout va se passer, qu'ils ne mèneront pas d'opérations punitives.
L'univers que l'écrivain dessine est tout en nuances, nourri par de fines connaissances historiques. Jamais il n'excuse les nazis, certes! Cela dit, il met aussi en avant certains éléments peu aimables de la Résistance, entre résistants de la onzième heure et responsables plus soucieux de régler des comptes personnels que de libérer la France. Réciproquement, il indique au travers du personnage de Jan Turenne qu'un cœur peut battre parfois sous l'uniforme d'un SS.
"Les Amants de juin" raconte en effet l'histoire d'amour compliquée entre Jan Turenne, un officier SS programmé pour faire le mal, et Arlette Savignac. Tous deux ont laissé parler leur amour, dans un esprit d'urgence que l'auteur restitue parfaitement, entre sensualité et pudeur: chaque nuit, chaque instant peut être le dernier en temps de guerre. La particularité? Selon l'auteur, qui relate à sa manière un épisode historique, c'est grâce à ces sentiments forts que les habitants de Pinols n'a pas subi le même sort que ceux d'Oradour-sur-Glane, brûlés vifs dans une église en représailles à des actions de résistance. On le comprend: l'intrigue est constamment tendue, et l'auteur, soucieux d'approfondir tant ses personnages que ses péripéties, sait tirer tout le potentiel dramatique de chaque action.
En se concentrant sur des personnages à la fois broyés par leur époque et en proie à leurs passions, l'auteur fait œuvre d'humanisme. Il dessine des individus mus par des ressentis universels, pour le meilleur et pour le pire, composant avec ce que leur époque leur donne; cet humanisme est la clé de l'équilibre d'un roman au thème a priori périlleux. Et le meilleur camp est bien entendu celui de l'amour, qui trouve toujours son chemin, si aride que soit le terrain, et ne tient parfois qu'à quelques fraises... Cela, dans un roman à l'écriture à la fois claire et détaillée, qui prend le temps de décrire les paysages dans un esprit de terroir, ainsi que ceux qui les habitent.
Albert Ducloz, Les Amants de juin, Saint-Paul, Lucien Souny, 2005/2009.
Le blog d'Albert Ducloz.
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