Il y aurait
indéniablement beaucoup à dire sur le rapport que l’écrivain Olivier Mathieu
entretient avec la photographie. Parmi ses livres, nombreux sont ceux qui sont
enrichis d’images tirées, souvent, d’albums de famille. Il n’est pas étonnant,
dès lors, que l’affaire David Hamilton l’interpelle, à telle enseigne qu’il lui
consacre un blog où il expose son avis personnel sur l’affaire. Rien d’étonnant
non plus, de la part de cet auteur, s’il livre à ses lecteurs cette méditation
de quelques dizaines de pages intitulée Le
Portrait de Dawn Dunlap.
Ce petit
livre s’ouvre sur le ressassement des souvenirs de l’homme de lettres, fidèle à
son habitude de faire de sa propre vie la matière de son œuvre. Les lecteurs se
retrouvent donc en terrain familier : il y a les filles d’Arromanches, et
l’évocation de la mémoire des artistes qui ont entouré l’enfance de l’auteur. On
y trouve une attention aux petites choses, des framboises dégustées par
exemple, ainsi qu’une nostalgie d’un temps qui ne reviendra pas.
Et il y a
des coïncidences troublantes, des dates qui résonnent. Elles permettent à
l’auteur de glisser vers le cœur de son sujet : le regard porté par David
Hamilton sur les très jeunes filles qu’il photographie. Et plus particulièrement
Dawn Dunlap, modèle fameux, évoqué en termes de pureté et d’innocence – une
innocence vue comme rare et fugace. A son tour, Dawn Dunlap rappelle des filles
disparues de la vie de l’auteur, à l’instar d’Alice, sa propre fille,
dédicataire d’ailleurs d’un roman précédent, intitulé Les drapeaux sont éteints. Une Alice qui rappelle Lewis Carrol…
Par deux
fois, l’auteur cite la phrase de David Hamilton : « Le sourire, c’est
bon pour les photos de vacances », rappelant, à la première citation, que
lui-même ne sourit presque jamais sur ses photos d’enfance. On peut regretter
qu’il reprenne cette phrase en début du chapitre « Philosophie du
sourire », introduisant ainsi une mercuriale à l’encontre des êtres
humains d’aujourd’hui. Celle-ci dissone, tel un couac pénible sur le mouvement
lent et mélancolique d’un quatuor à cordes.
Récit d’une
émotion partagée, Le Portrait de Dawn
Dunlap est un petit livre richement documenté, et celui qui souhaite aller
plus loin piochera avec profit dans l’abondante bibliographie qui le complète. Enfin,
le lecteur laissera résonner, en complément à cet opus, les citations que
l’auteur lui livre au sujet de David Hamilton – qu’elles soient de lui ou de
ceux qui en ont parlé.
Olivier Mathieu, Le Portrait de Dawn Dunlap, Cluj-Napoca, Casa Cartii de Stiinta,
2017.
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