samedi 7 septembre 2019

Un fantôme nommé Helen Svenson

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Olivier Papaux – A la poursuite d'Helen Svenson, inlassablement: c'est derrière ce fantôme, ce McGuffin que court Jul Jarson, le narrateur du roman "Les enfants de la baie". Et le lecteur court avec lui! "Les Enfants de la baie" est le premier roman de l'écrivain suisse Olivier Papaux. Cet ouvrage embarque son lectorat de la Suisse vers Islay et vers la Normandie.


Tout commence pourtant par un fait paradoxal: le fameux Jul, professeur de français dans un lycée, s'enthousiasme pour l'unique roman d'Helen Svenson, qu'il reconnaît pourtant être intrinsèquement porteur d'ennui puisqu'il raconte l'histoire d'une femme juive qui attend son amant nazi, perdu quelque part, mort peut-être. Ce paradoxe se résout lorsqu'on pense que le style doit primer l'histoire. De là, sans doute aussi, la pureté stylistique et la sobriété de l'écriture des "Enfants de la baie". Mais s'ennuie-t-on à lire ce roman? Guère.

Courir après un fantôme, dans "Les Enfants de la baie", c'est aussi assister à la naissance d'un écrivain – qui, pour le coup, pourrait se confondre avec Olivier Papaux lui-même. Certes, les noms divergent; mais d'un autre côté, l'auteur indique en toute fin de roman que le nombre de chapitres du livre écrit par Jul est le même que celui de son propre roman. Et c'est bien à Helen, cette Helen fictive qui cristallise tout ce que l'auteur a lu et le nourrit dans son travail d'écriture, que ce premier roman est dédicacé. Cette Helen qui inspire aussi Jul Jarson...

Quant à nommer son personnage "Jul", presque "Jules" mais pas tout à fait, c'est la meilleure manière de montrer son incomplétude. Celui-ci a en effet une vocation d'écrivain en lui, et courir après Helen Svenson la lui révèle. Et lui permet aussi de trouver sa moitié... amoureuse.

Quant au jeu de piste, il conduit Jul Jarson à rencontrer quelques personnages assez hauts en couleur, parfois désignés par des surnoms qui peuvent être autant de masques: l'un d'eux s'avère menteur, afin de protéger un secret sur cette île d'Islay où tout se sait très vite, où un étranger comme Jul est vite repéré. Il y a aussi l'entreprenante et mystérieuse Kirsteen, femme libre, amatrice de bons alcools, qui apparaît comme une pièce rapportée dans l'île. Qui est-elle vraiment?

Bons alcools? Il ne saurait y avoir d'Ecosse sans whisky! L'auteur ponctue "Les Enfants de la baie" d'évocation fugaces ou plus appuyées de ces breuvages, évoqués en connaisseur qui connaît ses classiques (Ardbeg, Bowmore, Lagavulin, pour n'en citer que quelques-uns), et confère ainsi à son roman un supplément de saveur.

Olivier Papaux, Les Enfants de la baie, Genève, Encre fraîche, 2019.


Le site des éditions Encre Fraîche.

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