Simona Brunel-Ferrarelli – "Les battantes", c'est le roman de quelques femmes de caractère, piégées dans les temps du fascisme italien dans un village où les traditions pèsent de tout leur poids. C'est contre cela qu'elles bossent... "Les battantes", c'est aussi le premier ouvrage de l'auteure Simona Brunel-Ferrarelli, native de Rome; gageons qu'elle a mis un peu de sa propre existence dans les pages de cet ouvrage. Ne serait-ce que par le biais de la photo de couverture, représentant une fillette juchée sur un aigle en bronze. Cette posture sera expliquée au fil des pages...
Les femmes fortes représentées ont de quoi surprendre, voire rebuter. "Les battantes" s'ouvre ainsi sur le monologue intérieur de Victoire Manfredi, institutrice qui arrive au village de Rocca Patrizia dans les années de guerre. Un monologue peu propice à créer de la sympathie, dans sa tonalité: l'auteure construit ce personnage au prénom explicite, Victoire, en lui conférant un air de supériorité peu aimable.
Autour de l'institutrice, évoluent plusieurs jeunes femmes. Roman aux points de vue multiples, "Les battantes" leur donne la parole, donnant naissance à des anecdotes fortes comme la punition subie par Lala, condamnée à manger un abricot, fût-il pourri, et engagée dans un bras de fer dont elle sortira gagnante, acquérant ainsi sa liberté de jeune femme. D'une chose simple, la romancière tire ainsi un enjeu de pouvoir.
C'est que "Les battantes" donne aussi à voir une société villageoise organisée de manière traditionnelle et rigide où les femmes ont droit à moins que les hommes, conditionnées par exemple dès leur plus jeune âge par les modalités de distribution de l'argent de poche. De plus, l'écrivaine radiographie ce monde des années 1943 en mettant en avant le clivage entre ceux d'ici et ceux d'ailleurs, touristes ou simples personnes implantées au village. Et bien entendu, face à une telle société, que la romancière décrit jusqu'à la caricature sans pour autant se défaire d'un ton sérieux, le lecteur d'aujourd'hui ne manque pas de réfléchir à l'accueil qu'il réserve à l'humain qui vient d'ailleurs.
S'il y a un thème qui s'impose au fil des pages, c'est bien celui des premières amours, des émois qui travaillent les adolescents. C'est là qu'intervient le personnage de Pablo, ce beau gosse à l'ascendance mystérieuse, que toutes les filles aiment. Les personnages de l'écrivaine en dresse d'ailleurs un portrait flatteur et passionné, exprimé en mots hyperboliques. Pour les battantes mises en scène, Pablo représente un piège: celui de l'amour. Mais l'instinct rapproche les êtres, les fait franchir un Rubicon symbole de séparation des classes sociales. Cela, quitte à assumer les grossesses non désirées et les lourds secrets de famille: est-il permis à tel personnage d'aimer Pablo?
Tous ces non-dits se retrouvent dans l'écriture de Simona Brunel-Ferrarelli, qui n'hésite pas à écrire des phrases elliptiques qui semblent s'arrêter avant leur fin. Celles-ci suggèrent ce qui n'est pas dit, avec minutie, et là encore, là surtout, les questions liées aux relations entre les hommes et les femmes sont centrales. Pour une femme, faut-il céder, faut-il accepter à ses risques et périls, physiques mais aussi sociaux?
Simona Brunel-Ferrarelli, Les battantes, Genève, Encre Fraîche, 2019.
Le site de l'éditeur.
Les femmes fortes représentées ont de quoi surprendre, voire rebuter. "Les battantes" s'ouvre ainsi sur le monologue intérieur de Victoire Manfredi, institutrice qui arrive au village de Rocca Patrizia dans les années de guerre. Un monologue peu propice à créer de la sympathie, dans sa tonalité: l'auteure construit ce personnage au prénom explicite, Victoire, en lui conférant un air de supériorité peu aimable.
Autour de l'institutrice, évoluent plusieurs jeunes femmes. Roman aux points de vue multiples, "Les battantes" leur donne la parole, donnant naissance à des anecdotes fortes comme la punition subie par Lala, condamnée à manger un abricot, fût-il pourri, et engagée dans un bras de fer dont elle sortira gagnante, acquérant ainsi sa liberté de jeune femme. D'une chose simple, la romancière tire ainsi un enjeu de pouvoir.
C'est que "Les battantes" donne aussi à voir une société villageoise organisée de manière traditionnelle et rigide où les femmes ont droit à moins que les hommes, conditionnées par exemple dès leur plus jeune âge par les modalités de distribution de l'argent de poche. De plus, l'écrivaine radiographie ce monde des années 1943 en mettant en avant le clivage entre ceux d'ici et ceux d'ailleurs, touristes ou simples personnes implantées au village. Et bien entendu, face à une telle société, que la romancière décrit jusqu'à la caricature sans pour autant se défaire d'un ton sérieux, le lecteur d'aujourd'hui ne manque pas de réfléchir à l'accueil qu'il réserve à l'humain qui vient d'ailleurs.
S'il y a un thème qui s'impose au fil des pages, c'est bien celui des premières amours, des émois qui travaillent les adolescents. C'est là qu'intervient le personnage de Pablo, ce beau gosse à l'ascendance mystérieuse, que toutes les filles aiment. Les personnages de l'écrivaine en dresse d'ailleurs un portrait flatteur et passionné, exprimé en mots hyperboliques. Pour les battantes mises en scène, Pablo représente un piège: celui de l'amour. Mais l'instinct rapproche les êtres, les fait franchir un Rubicon symbole de séparation des classes sociales. Cela, quitte à assumer les grossesses non désirées et les lourds secrets de famille: est-il permis à tel personnage d'aimer Pablo?
Tous ces non-dits se retrouvent dans l'écriture de Simona Brunel-Ferrarelli, qui n'hésite pas à écrire des phrases elliptiques qui semblent s'arrêter avant leur fin. Celles-ci suggèrent ce qui n'est pas dit, avec minutie, et là encore, là surtout, les questions liées aux relations entre les hommes et les femmes sont centrales. Pour une femme, faut-il céder, faut-il accepter à ses risques et périls, physiques mais aussi sociaux?
Simona Brunel-Ferrarelli, Les battantes, Genève, Encre Fraîche, 2019.
Le site de l'éditeur.
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