Roland Topor – Un peu de légèreté et d'humour absurde, cela ne fait jamais de mal en ces temps moroses, alors que l'automne et l'actualité s'ingénient à plomber l'ambiance. Alors, pourquoi ne pas revenir à l'esprit ravageur de Roland Topor (1938-1997)? Ce nom, certains d'entre vous l'avez vu passer dans le générique des émissions pour enfants "Téléchat", dont la singularité a rarement été égalée. Et voilà: son œuvre s'adresse aussi aux grands.
Son dernier livre, "Vaches noires" en est la preuve. Il réunit trente-trois textes courts à l'esprit grinçant ou potache, aux saveurs infiniment variées. Il y a par exemple un brin de mauvaise foi dans la chronique qui donne son titre au roman, "Vaches noires": celle-ci soutient que pour ce qui est de porter la poisse, les vaches noires ne valent pas mieux que les chats noirs. Les preuves sont là...
Dans un esprit semblable, "La terreur est dans l'escalier" fait immanquablement penser au running gag du film "Signé Furax" de Marc Simenon: on y préconise de prendre l'ascenseur parce que l'escalier est en dérangement. Là, c'est le souvenir de Francis Blanche et de Pierre Dac qui apparaît en filigrane.
L'auteur réussit par ailleurs à se glisser dans plus d'un personnage plus ou moins insolite, avec succès, pour mieux réussir la caricature. Faisant parler un phallus (oui, oui!) dont la vie n'est pas de tout repos, "La Vocation des profondeurs" évite adroitement l'excès de lourdeur et fait sourire grâce à un choix de mots et de formulations plein de finesse, euh, pénétrante.
L'ouvrage recèle aussi son lot de personnages trompés (parfois par eux-mêmes) mais contents, de gars pas bien dans leur tête (celui qui, gavé de porno, aime placer sa femme dans des positions bizarres afin de lui faire l'amour alors qu'elle dort dans malaisant "Le goût salé de la vie"). Il se termine sur un récit de science-fiction étrange et absurde où la vedette d'un cinéma n'a rien d'une Marilyn Monroe. Ce qui ne l'empêchera pas d'être une vraie star à l'avenir...
Etranges, tordus, drolatiques, les textes réunis dans "Vaches noires" savent amuser tout un chacun, d'une manière sans cesse renouvelée. Entre le chômage des toilettes, l'hygiène intime des éléphants et les Mickeys porte-malheur (mais pas les chats noirs, hein! au risque de me répéter...), les situations dingues abondent, les chutes sont brillantes, l'humoriste fait feu de tout bois pour créer mille rires et sourires au fil des pages: voilà un court ouvrage qui permet de passer un moment en mode joyeusement majeur.
Roland Topor, Vaches noires, Paris, Wombat, 2011. Illustrations de l'auteur.
Le site des éditions Wombat.
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