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vendredi 23 septembre 2022

Une histoire de loups-garous qui ne manque pas de mordant

Jean-Luc Bizien – "Mastication", voilà un roman qui claque! Plus précisément, où les mâchoires claquent, de même que les armes à feu. Pour sa contribution à la défunte collection "Club Van Helsing" des éditions Baleine, l'écrivain Jean-Luc Bizien lance son personnage principal, le combattant serbe Vuk, sur les traces de loups-garous reconvertis dans la finance. Ce qui ne les empêche pas d'avoir des comportements de requins, bien entendu.

Il faut un peu de temps pour entrer dans l'ambiance et voir évoluer Vuk, personnage violent et sans états d'âme, amateur de sang qui gicle, passé par les guerres de Yougoslavie et par la Légion étrangère. Le lecteur l'observe hantant les bas-fonds glauques de Paris, métro ou Montmartre, traquant des vampires plus ou moins réels, capable de dessouder de simples humains déguisés dans un style gothique – ceux que le roman nomme "vampyres" avec un y.

Un faux pas va le jeter entre les griffes des lycanthropes, et c'est là que l'action démarre vraiment. Et ça va secouer grave! Tout au long du roman, l'auteur décrit les bagarres et les cadavres avec ce qu'il faut de complaisance sordide, faisant usage d'un sens de l'image parfois délicieusement douteux ("Les cadavres étaient déchiquetés, on leur avait ouvert la tripaille et les pavés étaient poisseux. J'avais l'impression de piétiner une fondue savoyarde", p. 57...). Le son y est aussi, bien sûr, de même que les odeurs. 

Et pour entrer dans le vif du sujet, c'est en tandem que Vuk va évoluer. En lui associant Maximus à la suite d'une sodomie rituelle qui a tout d'un viol, l'auteur crée un tandem "la tête et les jambes" classique, qui peut faire penser à San-Antonio et Bérurier dans la série de romans policiers de Frédéric Dard, d'autant plus que Maximus est doté d'un physique imposant qu'il nourrit copieusement, ainsi que d'un penchant prononcé pour les blagues potaches. 

Afin de contrebalancer l'effet brutal que la description de violences peut avoir sur le lecteur, en effet, l'auteur joue à fond la carte de l'humour, usant sans retenue de l'ensemble des nuances qu'il permet: si certains gags sont amenés de manière légèrement poussive (mais on ne boude pas son plaisir, hein!), d'autres sont extrêmement bien envoyées, afin qu'il y en ait vraiment pour tout le monde. L'un des traits d'humour, emprunté à Colin Thibert, prend aussi la forme d'un hommage à Thierry Crifo. Enfin, on ne peut que sourire lorsque Maximus, soudain en mode intello féru d'étymologie, fait un subtil distinguo lexical entre les termes "enfoiré" et "enculé"...

Etait-il indispensable, enfin, d'ouvrir le roman par un avertissement précisant en substance que l'auteur ne partage pas l'homophobie et le racisme de son personnage principal? J'en doute: si Vuk n'est pas un saint, ces traits de caractère sont pas déterminants pour une action plutôt fondée sur l'exploitation approfondie de la part d'animalité qu'il y a en chacun de nous et qui ne demande qu'à s'exprimer à grands coups de mâchoires et d'armes à feu. Cela, dans une ambiance qui, en plus d'être très drôle et très second degré, est parfaitement rock'n'roll, tendance gothique ou métal: le lecteur n'a qu'à suivre la narration pour se faire sa petite playlist musclée et qui dépote à fond.

Jean-Luc Bizien, Mastication, Paris, Baleine, 2007.

Lu par AlbédoCassiopéeEfelleJérôme, La LiseuseLes Imposteurs, Nebalia.


2 commentaires:

  1. Il a l'air de dépoter ce roman ! Le ton de ta citation me plaît bien même si le roman semble peut-être un peu plus gore que ce que je lis...

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    1. En effet, c'est gore, rien n'est épargné... D'un autre côté, c'est bien rock'n'roll et rythmé à fond. Un bon divertissement!
      Je te souhaite une bonne semaine! :-)

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