Pages

mercredi 27 septembre 2017

Le sourire gourmand de Montmartre

41R1CIQ4AOL._SX342_BO1,204,203,200_
Bruno Testa – Des lettres? Il était certes facile, pour Bruno Testa, de réunir quelques 36 textes sur Montmartre sous le titre de "Lettres de mon Moulin-Rouge", en clin d'œil à Alphonse Daudet. Mais ce livre, ce ne sont pas vraiment des lettres, en fait: ce sont plutôt des chroniques et des choses vues, voire de petites histoires tissées au fil des jours à l'ombre du Moulin-Rouge. Des "nouvellettes", comme les a surnommées Claude Duneton, cité en exergue, avec reconnaissance.


Comme fil rouge, le lecteur suit un narrateur nommé Renato, alter ego de l'auteur peut-être, dans ses pérégrinations montmartroises. Renato est un auteur sans emploi stable, aux finances précaires, poète dans l'âme, désireux de rédiger le roman d'un homme qui ne se lève pas – alors que lui-même ne manque jamais de se lever pour se promener. Des allusions à ces activités parsèment le livre, lui donnant une nécessaire cohésion.

Cohésion également grâce à la récurrence de certains personnages, qu'on voit vivre, boire des verres, mourir, d'un chapitre à l'autre. L'auteur en dessine le portrait avec tendresse. A travers eux, à travers elles aussi puisque c'est aussi le coin des filles de joie, c'est la survivance de l'âme d'un quartier populaire que l'écrivains s'attache à déceler, derrière les coins et bistrots à touristes chers et peu amènes.

Mais on ne saurait manquer les hauts lieux du quartier, que ce soit Moulin-Rouge ou le Sacré-Cœur – une église où l'on se rend lorsqu'il y a de la visite. A l'ombre de ces géants qui aspirent les touristes, l'auteur débusque aussi les petites rues, les lieux cachés, avec curiosité et gourmandise. Il mentionne ainsi le joli restaurant Tifinagh, avant de basculer vers le cimetière de Montmartre. D'une bière à l'autre, il n'y a qu'un pas... et d'une rue à l'autre, l'observation est fine, les rapprochements cocasses.

Cette gourmandise, le style la souligne, pour le plus grand délice du lecteur. L'écriture est fluide et aisée; gouailleuse juste ce qu'il faut pour ne pas tomber dans la caricature, elle est cependant émaillée d'amusants jeux de mots, de surprises stylistiques. Autant que la description des lieux, c'est donc la plume de l'auteur qui emmène son lectorat du côté du nord de Paris, avec le sourire.

Bruno Testa, Lettres de mon Moulin-Rouge, Lyon, Utopia Editions. 2015.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Allez-y, lâchez-vous!