Pierre Yves Lador – Une philosophie de la marche, présentée comme un réquisitoire contre la mode du développement personnel: voici ce que propose l'écrivain Pierre Yves Lador dans son dernier ouvrage, "Le marcheur vertical". Il y sera question de la marche à pied, reflet en quelque sorte de la marche du monde, à travers certaines marottes de l'auteur. Un auteur qui, doucement anarchiste dans l'âme, refuse toute étiquette. En particulier celles de sportif et d'écologiste, qu'on pourrait pourtant lui prêter.
L'écrivain se met donc en scène, marchant dans ce Pays d'Enhaut où il vit aujourd'hui, et marche par monts et par vaux, contemplatif. On le voit attentif aux beautés de la nature, conscient cependant que celles-ci sont périssables et qu'elles doivent parfois mourir pour que d'autres vivent (d'où le rejet du véganisme, dont l'auteur s'est expliqué avec génie dans son pamphlet "Variations vegan"). Montent les souvenirs, monte aussi la philosophie d'une vie vécue en sandales, les pieds à l'air, à la portée des fourmis qui piquent et paniquent, à distance sociale de toute injonction, covidienne entre autres.
La marche apparaît ainsi, au fil de pages de réflexion écrites en des phrases musicales et obsédantes, sinueuses comme une sente, longues parfois comme un faux plat ou une descente périlleuse, comme un art de vivre par excellence, éminemment gratuit et enrichissant (parce que gratuit, tiens!), non soumis aux règles de l'économie. La simple marche se pose ainsi en opposition à ce qui se présente comme le "développement personnel", avatar d'un feel-good rebaptisé "filgoude" par moquerie, et dont le succès se mesure avant tout aux recettes de l'influenceur qui a trouvé le filon.
Mesure? L'auteur rejette l'idée même de mesure, et marche, tout simplement, loin des dix mille pas préconisés ou des montres intelligentes qui indiquent rythme cardiaque ou données physiologiques en tous genres. La seule mesure, dès lors, c'est celle d'un esprit qui aime battre la campagne, avançant un pied devant l'autre et s'offrant le luxe d'être farouchement libre, dégagé de toute injonction. Cela transparaît dans cette écriture typique de l'écrivain, avide d'embrasser le monde entier, assumant de paraître touffue – ou, plus exactement, infiniment généreuse.
Pierre Yves Lador, Le marcheur vertical, Dole, Olivier Morattel Editeur, 2024. Postface de Quentin Mouron.
Le site de Pierre Yves Lador, celui des éditions Olivier Morattel.
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