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samedi 5 janvier 2019

Dunia Miralles, une irruption dans le fantastique revisité

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Dunia Miralles – C'est sous le signe de l'écrivain américain Stephen King, mais aussi celui de Charles Baudelaire, que se place "Folmagories", un recueil de cinq nouvelles signées Dunia Miralles. Avant tout connue comme romancière, auteure en particulier du livre culte "Swiss Trash", l'écrivaine revisite dans "Folmagories" le genre classique de la nouvelle fantastique, pétri d'incertitudes et d'ambiances nocturnes. Elle s'inscrit ainsi dans une tradition qui a vu s'exprimer des écrivains tels que Guy de Maupassant.

En ouverture du recueil, nimbé d'accents espagnols et de couleurs vertes, "La Verde" met en scène un écrivain en panne d'inspiration... ou qui se cherche des excuses. Il est permis de penser qu'il y a un peu de l'auteure elle-même dans celui qui s'exprime au fil des pages de cette nouvelle; en tout cas, la mise en première place d'un texte mettant en scène un écrivain signale l'importance que l'auteure du recueil accorde à son art. Cela, même si l'inspiration manque... Se chercher des excuses? Oui: l'auteur mis en scène se sent sec, fondamentalement, puis peine à écrire alors qu'un enfant pleure au loin. Son absence d'inspiration peut aussi être vue comme l'absence d'inspiration des architectes qui ont construit l'immeuble sans âme où a trouver à se loger pour, espère-t-il, écrire.

L'écriture de cette première nouvelle dénote un souci certain du rythme: il semble que l'écrivaine gomme le sujet lorsqu'il n'est pas indispensable dans ses phrases, simplement pour aller plus vite. Vers la fin, "Retourne écrire! T'as retrouvé l'inspiration.", suggère un personnage autour de l'écrivain. Vraiment? Pour qu'un écrivain ait envie de se remettre au travail, il ne suffit pas de l'ordonner ainsi. C'est donc sur une assertion faussement forte que s'achève "La Verde".

Il y a quelque chose de la déclaration amoureuse post-mortem dans "Stagliano", nouvelle médiane du livre, qui trouve place dans un cimetière et met en scène une femme qui a perdu un être cher. Que signifie l'heure de la fermeture dans cette nouvelle? Est-ce un confinement au cimetière ou un éloignement définitif, dicté par la mort? Le souvenir de la sensualité, celui de l'être cher, subsiste; mais sortir du cimetière, c'est aussi fermer la porte sur un lien privilégié. De ce point de vue, les dernières phrases, rapides comme des vers, sonnent comme autant de sentences définitives. Et de très loin, on pense à "L'heure de la fermeture dans les jardins d'Occident" de Bruno de Cessole.

Les nouvelles qui suivent installent un climat fantastique plus classique, avec à leur base des personnages bien connus des amateurs d'irréel. La spéléologie qui constitue le cadre de "Vouivre" est une invitation originale à plonger dans des mondes obscurs – aux ambiances nocturnes différentes et novatrices, pour le coup! – qui sont un prolongement aux ambiances urbaines et nocturnes de "La Verde"; les noms des personnages eux-mêmes suggèrent un climat étrange. Il est question en effet de Radon le gazeux (beau nom pour un gaz rare, on dirait un aptonyme...), mais aussi de Troll et de Vampire. Côté personnages bizarres, bien sûr, il y aura aussi les feux follets de "Appolutin et Rizhida", porteurs de conformisme gris, tueurs de la poésie qui est l'essence de toute littérature. Et même ce rapace qui invite le personnage principal de "L'Envol" à gommer les frontières entre les genres: pour le coup, l'auteure se risque à l'écriture inclusive, et c'est là-dessus que le recueil s'achève.

Bien construites, les nouvelles de "Folmagories" n'ont que l'apparence de la sagesse. Elles utilisent la définition classique du genre fantastique pour créer des mondes résolument contemporains, écrits avec les mots d'aujourd'hui, déclinés de manière sobre: si les phrases peuvent être rapides, si le retour à la ligne intensif s'y met pour accélérer le débit, force est de constater que ces écarts concourent à un rythme dosé en fonction de textes nourris par des points de vue et des propos variables, qui requièrent à leur tour, et l'auteure l'a bien compris, une musique à la fois différente, pour marquer un territoire, et similaire, pour créer une unité au cœur d'un livre qui assume, dès son titre en forme de néologisme, son grain de folie.

Dunia Miralles, Folmagories, Lausanne, L'Age d'Homme, 2018.

Le site de Dunia Miralles, celui des éditions L'Age d'Homme.


2 commentaires:

  1. Je ne suis pas très recueil de nouvelles et là, à lire ta chronique, je ne suis pas sûre que cela me plaise.
    Sinon, je trouve la couverture très jolie !

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    1. On est clairement dans le genre fantastique, avec ce que cela peut comporter d'ambiances nocturnes…

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