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dimanche 7 février 2021

Dimanche poétique 485: Jacqueline Thévoz


L'Infini

Alors qu'aucun
De nos doctes philosophes
N'a pu m'expliquer l'Infini,
Je l'ai trouvé, l'autre matin,
Dans ma salle de bain.
Y grouillaient des milliers de fourmis,
Effrayante et mouvante et sombre étoffe,
Diabolique et noir gratin...
J'ai couru chercher ail et sel
Pour en faire poisons naturels,
Mais comme ce peuple, élu
Par un dieu sûrement farfelu
Et friand de gigantesques sectes,
Continuait à jouer à l'intrus,
J'ai couru
Quérir en droguerie
De quoi mettre fin à cette tragédie
Et passé ma soirée à poudrer ces insectes.
Or, quand, au petit matin,
J'ai réintégré ma salle de bain
Une procession infinie
Se dirigeait, en long ruban, vers la sortie
Comme une interminable agonie.
Mais, diable, il y avait
Tout autant de fourmis qui regardaient partir
Leur sœurs qui s'en allaient,
En cortège, en longue file,
Si bien que je désespère de voir déguerpir
Ces minuscules bêtes immortelles.
L'Infini à domicile,
L'Infini éternel...

Jacqueline Thévoz (1926-2021), De la Terre au Ciel, Sierre, Editions à la Carte, 2015.

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