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samedi 17 décembre 2016

Tatjana Erard, un regard poétique sur la ville de Fribourg

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Fribourg, sa ville, et même sa basse ville... autant de lieux qui ne manqueront pas de parler aux habitants du cru, ni même à celles et ceux qui auront l'occasion de le visiter. C'est ce monde particulier que l'écrivaine Tatjana Erard, Fribourgeoise passionnée, a choisi de croquer en seize parties. On hésite à leur donner le nom de nouvelles, tant il est vrai que ces séquences tiennent plutôt, parfois, de la prose poétique: on ne peut qu'être admiratif devant l'aptitude naturelle de l'auteure à fondre son écriture dans son propos.

La Basse-Ville de Fribourg, ce sont surtout des personnalités, que l'écrivaine fait revivre en allant à l'essentiel. Certes, il y aura les aînés, celles et ceux qui vont au loto à Saint-Léonard, bardés de leurs superstitions exquises, en regrettant le temps ancien où les jeux se passaient dans les quartiers. Il y aura quelques célébrités locales, comme Bouby et son accordéon ou Hubert Audriaz et son vélomoteur, qui a droit à un chapitre entier. Un chapitre où il est question de cantonniers - et à Fribourg, il en est, à l'instar de Michel Simonet, qui sont best-sellers...

Dans un esprit populaire, l'auteure recrée soigneusement un langage typique, où les tours locaux sont légion. Elle a le chic pour faire résonner des mots comme "cheni" ou "técolle", et n'hésite pas à se frotter à cette espèce de créole typiquement fribourgeois qu'on appelle le bolze. Cette recréation est un passage obligé pour ce livre, qui donne la parole aux personnages illustres ou anonymes de la ville de Fribourg: leurs paroles sonnent vrai, par exemple dans "A la Fête-Dieu", quatorzième des seize nouvelles du recueil - la Fête-Dieu de fribourg a du reste été décrite par le poète Vincent Francey, en des termes fort différents.

Si la parole des spectateurs de la procession rituelle de la Fête-Dieu sont bien représentés, la question de la foi catholique émerge également avec talent dans "La moniale", qui met en parallèle une bonne soeur heureuse de l'être et la narration de l'évangile de la Samaritaine. Comme par hasard, d'ailleurs, il y a une rue de la Samaritaine à Fribourg... L'écrivaine donne du reste la parole à toutes sortes de personnages bien ancrés, comme les gens qui vont livrer le journal "La Liberté" aux petites jeures.

Alors certes, "Méandres" ne cherche pas à éclairer les zones d'ombre de l'histoire fribourgeoise: enfance placée, enseignants par trop sévères, héritage pas toujours net d'une démocratie chrétienne particulièrement conservatrice. Sans tomber cependant dans une naïveté extrême qui ne relèverait que ce qui est beau, l'auteure s'efforce de dessiner au plus près ce que peut être la ville de Fribourg aujourd'hui. Livre finement observé, "Méandres", observation des populations de toujours d'une petite ville de Suisse romande, traversera sans doute quelques décennies d'histoire.

Tatjana Erard, Méandres, Fribourg, Faim de Siècle, 2016.

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