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mercredi 3 octobre 2018

Amour et navigation à voile, aux prises avec les éléments naturels

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Gilles de Montmollin – Une bath nana, un trobogosse et quelques voiles bien dressées au-dessus d'une belle coque de bateau: dans "Une sirène", l'écrivain suisse romand Gilles de Montmollin retrouve l'univers qui constitue son élément: celui de la navigation. Cela, dans le style réaliste et accrocheur que le lecteur lui connaît.


Avec "Une sirène", Gilles de Montmollin fait son entrée dans la collection "Uppercut" des éditions BSN Press, consacrée aux micro-romans. Peut-on encore parler de roman avec cet opus? L'intrigue est pour ainsi dire celle d'une nouvelle: un jeune homme assez au fait de la navigation à voile, Loïc, donne un coup de main à une femme inexpérimentée, Lorraine, qui pilote un voilier; bien en fonds, celle-ci l'engage à bord de son voilier. Et plus si entente... mais le garçon constate assez vite que quelque chose ne colle pas.

Et ce qui ne colle pas, le lecteur le comprend peu à peu, sans toutefois avoir la totalité du fin mot d'une histoire qui aurait pu prendre les contours d'un bon thriller. Qui commande par exemple le navire qui poursuit "Circé", le voilier de Lorraine? Et que veut-il? On ne le saura guère. D'autant plus que Loïc, s'il se montre audacieux face aux filles, n'est pas le genre de personnage à vouloir percer tous les secrets. En définitive, derrière ses prétentions à la virilité, c'est un amoureux transi, préférant l'illusion agréable du mensonge à l'ingrate vérité, voire à l'implacable justice: "Je n'ai jamais tenté de retrouver celle que j'appellerai toujours Lorraine", conclut-il, alors qu'il  connaît une partie de la raison d'être de ce (faux) prénom et vient d'être fichu à la baille par celle qui l'a engagé.

Dès lors, c'est ailleurs qu'il faut rechercher l'intérêt de ce petit roman, ou de cette novella. Il y a évidemment l'envoûtement de l'amour entre un homme et une femme. Certes loin d'être une fille facile, présentée comme pas franchement jolie mais quand même piquante, Lorraine sait cependant séduire Loïc, à sa manière à la fois mystérieuse et lisible: le secret fascine, quitte à ce qu'il reste un secret. Il envoûte, tel le chant des sirènes – c'est peut-être là l'un des sens qu'on peut donner au titre du livre. Magicienne des sentiments, Lorraine? On peut l'imaginer, d'autant plus que son navire, le "Circé", porte aussi le nom d'une magicienne antique. L'auteur souligne d'ailleurs à l'envi la beauté du voilier, ainsi que sa grâce à l'ancienne.

Il est donc avant tout permis de voir dans "Une sirène" un hymne sincère, amoureux pour le coup, à la beauté de la navigation à voile. Celle-ci s'inscrit entre tradition et modernité: si "Circé" est un beau voilier, il est aussi équipé d'un moteur. Mais pour parler de l'embarcation, l'auteur écrit de belles pages, techniquement précises sans jamais ennuyer. Il met en valeur le vocabulaire rare et précieux de la navigation en se consacrant à la description de ce voilier et des manœuvres de ceux qui le font naviguer. Et enfin, il sait aussi observer la nature, les vents, la mer Méditerranée, et en capter les splendeurs parfois dangereuses. Cela, pour dessiner la navigation à voile comme une manière qu'a l'être humain d'être aux prises avec les éléments naturels.

Gilles de Montmollin, Une sirène, Vevey, BSN Press, 2018.

Le site de Gilles de Montmollin, celui des éditions BSN Press.

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